Le nombre de fonctionnaires employés dans les ministères a plus que doublé depuis que le Fidesz a retrouvé le pouvoir en 2010. En parallèle de ses coupes dans la fonction publique, Viktor Orbán a mis sur pied une bureaucratie concentrée dans ses mains.
En 10 ans, le nombre de fonctionnaires au sein des ministères a doublé en Hongrie. Comme le montre le journal de gauche Népszava, il y avait 5 748 employés de ministères en 2010, année de retour au pouvoir du parti de droite. L’an prochain, ils seront 11 979, soit plus du double.
Cette expansion de la bureaucratie se traduit aussi par ces chiffres : les ministres, secrétaires d’État et vice-secrétaires, qui étaient au nombre de 106 dans le premier gouvernement Orbán (1998-2002) sont aujourd’hui 198.
Cette évolution s’explique partiellement par le fait que beaucoup d’institutions publiques indépendantes ont été absorbées par des ministères, dans un mouvement de recentralisation, de reconcentration et de verticalisation du pouvoir central. C’est par exemple le cas de l’Agence nationale de Développement, dont les 500 employés ont été répartis entre les différentes administrations.
+1913 % employés au Cabinet du Premier ministre !
À son arrivée au printemps 2010, Viktor Orbán avait été accueilli par 93 employés au Cabinet du Premier ministre. Onze années plus tard, ils sont 1 872, soit une augmentation de 1913 % des effectifs. A ceux-ci s’ajoutent la création d’un bureau du gouvernement qui emploie 362 personnes, ainsi qu’un bureau du cabinet du Premier ministre, regroupant 548 fonctionnaires.
Là encore, cela témoigne d’une concentration des pouvoirs dans les mains du premier ministre, dont le Cabinet a capté des compétences relevant auparavant d’autres ministères. Des compétences en matière d’environnement, de culture, de santé, et d’éducation – qui n’ont pas de ministères à proprement parler et sont grosso modo regroupés au sein du ministère des Ressources humaines – ont été transférées vers le Cabinet du Premier ministre, aux compétences d’autant plus élargies qu’il a aussi obtenu beaucoup de tâches administratives jusqu’alors dédiées au ministère de la Justice.
Au contraire, le ministère de la Justice a vu ses effectifs fondre de près de 40 % sous le Fidesz. Le ministère de l’Agriculture compte 6% de fonctionnaires en moins, alors même qu’il s’est vu attribuer les tâches de l’ancien ministère de l’Environnement, qui a lui purement et simplement disparu. Dans le même temps, le ministère des Affaires étrangères et du Commerce extérieur a gonflé de 40%. Cela aurait pu être du fait du transfert du domaine « commerce extérieur » depuis le ministère de l’Innovation de la Technologie, mais ce même ministère a dans le même temps connu une croissance de 400%.
Cette centralisation exacerbée des pouvoirs se traduit aussi par la nouvelle Constitution de 2012, qui a transféré de nombreuses compétences des collectivités territoriales vers le gouvernement. Ceci à des fins tant idéologiques et pratiques (donner un pouvoir décisionnaire à un État fort), mais aussi à des fins clientélistes : le gouvernement est maintenant en mesure d’offrir des positions avantageuses à ses fidèles.
Coupes dans la fonction publique
Cela signifie-t-il que la droite, réélue en 2010 sur la promesse de mettre un terme aux politique d’austérité mises en place à la fin des années 2000, a mis cette administration élargie au service de politiques publiques plus ambitieuses ? Les comparaisons internationales effectuées par Eurostat ou l’OCDE montrent que la Hongrie est parmi les pays qui consacrent le plus de budget au fonctionnement de son État, mais le moins de budget à l’Éducation et à la Santé.
Photo d’illustration : L’ancien Théâtre du château où a déménagé le Cabinet du Premier ministre. (Crédit : redoctober – Indafotó, CC BY-SA 2.5 hu, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=16829301)