« Un assassinat politique, en Hongrie ? – Bien sûr que ça peut arriver »

Transcription* d’un entretien téléphonique entre un journaliste de « Hír24 » avec le magnat des médias Lajos Simicska, peu après que celui-ci ait déclaré la guerre au Premier ministre Viktor Orbán. L’homme d’affaires se trouve actuellement en Autriche, selon « Népszava » et « HIR24 ».

– Bonjour, je suis József Nagy de « HIR24 ». Vous êtes Lajos Simicska ?

– C’est moi en personne. Que voulez-vous savoir ?

– N’avez-vous pas peur qu’avec les décisions d’aujourd’hui (de virer tous vos employés) vous détruisiez le Fidesz ?

– Désolé, je ne comprends pas, de quelle décision d’aujourd’hui parlez-vous ? Je viens d’être informé il y a moins d’une heure que l’ensemble du staff de mes médias a démissionné, et je suis sur le point de passer en revue et de remplacer tous les employés. Qu’est-ce que vous avez en tête ? Quel genre de décision dois-je prendre ? Que dois-je faire?

– Dans la dernière heure vous avez fait des déclarations très fortes au sujet de vos anciens employés…

– Des déclarations fortes ? J’ai été particulièrement calme jusqu’à maintenant. Je pourrais faire des déclarations beaucoup plus fortes. J’ai été particulièrement retenu dans mes déclarations. Vous pouvez même publier ça.

– J’y comptes bien.

– Vous enregistrez ou vous prenez des notes ?

– J’enregistre, bien sûr.

– Alors publiez que j’ai été particulièrement tendre jusqu’à présent et que j’aurais pu dire des choses bien pires.

– Zsolt Bayer [journaliste fidèle à Orban, ndlr] a écrit : « ce que vous faites maintenant, Lajos, est une honte. »

– Il a dit cela ? Où ?

– Je l’ai lu dans le « Magyar Hírlap » d’aujourd’hui.

– Ah bon ? Je n’ai pas lu le Magyar Hírlap. C’est ce qu’il a écrit ?

– Je vais vous lire le paragraphe entier, alors.

– Allez-y.

– « Vous savez comme moi, cher Lajos, qu’il n’y aurait pas de Fidesz aujourd’hui sans vous. Depuis 1994. Mais ce que vous faites maintenant, c’est une honte ».

– C’est ce qu’il a dit ?

– Oui.

– Eh bien, permettez-moi de répliquer avec une phrase : s’il te plaît Zsolt, rappelles-toi exactement combien d’argent tu me dois, car il serait grand temps de le rembourser.

– Combien d’argent Zsolt Bayer vous doit-il ?

– Je ne me souviens pas par cœur. Beaucoup, des millions. Il serait bien qu’il puisse me rembourser maintenant.

– Y a-t-il beaucoup de gens du Fidesz qui sont endettés auprès de vous ?

– Vous ne voulez pas en savoir trop. Mais après ce que ce petit connard a dit sur moi, oui, vous pouvez même publier « connard », par tous les moyens, connard c’est le bon adjectif pour ce rat […].

[ndlr : nous avons choisi de traduire « géci » par « connard », mais d’autres préfèrent le terme « enculé », cela se discute…].

– Qui essaie de vous poignarder en ce moment ?

– Viktor Orbán. C’est assez pour vous ?

– Vous venez de dire que Zsolt Bayer est un connard. Que diriez-vous de Viktor Orbán alors ?

– C’est aussi un connard.

– Vraiment ?

– Viktor Orbán est un connard. C’est ce qu’il est. Vous pouvez publier ça.

– Comment peut finir cette guerre ?

– Eh bien, je ne sais pas. Lui ou moi tombera.

– Lequel ?

– Comment je pourrais le savoir ?

– Nous sommes deux sur le champ de bataille. C’est ça une guerre, ce sera lui ou moi. Qui peut savoir à l’avance ? Quelqu’un va mourir à la fin, non ?

– Pouvez-vous être le perdant ?

– Évidemment.

– Qu’est-ce que ça signifie exactement ? Quitter le pays, abandonner vos intérêts ? Ou vous voulez dire, physiquement ?

– Physiquement, bien sûr. Je parle de physiquement.

– Alors vous pourriez être tué dans ce conflit ?

– Bien sûr, et facilement. Mais ce sera la seule chose qui puisse m’arrêter.

– Mais…comment ?

– Comment je peux le savoir ? Ils me tuent, ils me tirent dessus ou je me fais écraser pas une voiture.

– Vous n’êtes pas sérieux là…

– Si si, je le suis.

– Un assassinat politique pourrait arriver en Hongrie ? C’est ce que vous êtes en train de dire ?

– Bien sûr que ça peut arriver.

– Quelqu’un peut pourrait abattre Simicska, juste comme ça ?

– Oui, oui, oui. Je peux être tué comme ça. Eh bien, publiez ça, au revoir, je dois y aller maintenant, je n’ai pas de rédacteur en chef… Je dois nommer un grand nombre de personnes tout à l’heure.

– Voulez-vous apparaître à la télévision ce soir ?

– Grand Dieu, non ! Mais croyez-moi, je dois y aller, la voiture m’attend, et beaucoup de personnes, je dois nommer un grand nombre de personnes, au Nemzet, à HírTV et tout le monde doit être opérationnel d’ici demain. Vous le savez. Et j’ai beaucoup de choses à gérer. Veuillez m’excuser. Et oui, vous pouvez tout publier : ce sont des connards, tout le monde peut être licencié, assassinat politique… Publiez cela. Je vous envoie mes salutations. Au revoir.

* La traduction du hongrois à l’anglais a été réalisée par Budapest Beacon, puis celle de l’anglais au français a été réalisée par Hulala.

7 Comments
  1. Monsieur Lehel ! L’intéret pour hulala, c’est la liberté de l’expression de la presse, de donner des informations objectifs, avec démocratie responsable, qui, bien entendu, n’est pas de votre gout.

  2. @Lehel
    Et voila! Vous etes pour la censure et l’info sélective!
    Bravo!!!
    Bref, avec vous et vos amis, « tout le monde, il est beau, il est gentil au Fidesz » !!!
    (Cachez moi cette « vomissure » que je ne saurais voir !!)

  3. C’est pas mal pour lui que ce gars s’en aille avant qu’une enquête détermine d’où viennent ses millions ou milliards .. ref Mesterhazy Jeno,l’ex éminence grise du maire précédent de Budapest (et mon voisin d’ailleurs ce qui a permis de suivre les dépenses éhontées faites dans son fief du Balaton) ou Gyurcsany avec ses propriétés d’Amérique du Sud . Avant le Fidesz,il y avait ceux qui plaçait l’argent de l’état et récoltait les intérêts pour leur compte,ceux qui vendaient des châteaux historiques dont ils avaient la gestion,pour une bouchée de pain officielle et empochant le reste …. etc etc Sans parler des officiels et des juges qui transformaient les manquements graves en petites amendes incompréhensibles …Bon maintenant c’est vrai que par moment Orban devrait être plus souple mais il est hongrois et c’est un batisseur .. Laissons le travailler tant qu’une relève valable se présente .

  4. @MCS

    Sans vouloir vous offenser, on a parfois du mal a vous suivre. Je suppose que vous etes Hongoise
    et bravo pour votre francais. Ceci dit, votre style me semble quelque peu confus, probablement reflet de vos pensées.. Ne vous offensez pas, car je vous suis reconnaissant de parler notre langue.

    Pour le reste: voila que vous espionnez vos voisins, maintenant ?? Et bien, c’est du beau !
    Vous connaissez le dicton de la paille dans l’oeil du voisin et de la poutre dans ses propres yeux ? Il existe aussi en hongrois (Más szemében a szalkát is meglátja, a magáéban a gerendát sem). Vous devriez vous y référer. Car, en matiere de corruption et de biens immobiliers, alors la, pour le coup, je me ferais plus discret a la place de vos chers amis, la bande a Orbán !!!

    Minden jót !

  5. @Waline
    Mon français vient de mon éducation française et je n’ai donc aucun mérite. J’ai travaillé dans le monde entier avec de multiples nationalités et par là de multiples façons de raisonner.
    Quant à l’espionnage de voisins, sachez qu’il est impossible de ne pas remarquer( et tous parlaient de ces travaux pharaoniques invisibles de l’extérieur) une vingtaine d’ ouvriers pendant une dizaine d’année ,amenés chaque jour par camionnettes bloquant la rue.
    Pour le reste, ce que je dis c’est qu’il n’y a pas d’alternative au Fidesz pour l’instant et que donc il faut le laisser travailler. Chacune de ses actions peut être interprétée .
    J’ai vécu à Singapour qq années et leur dictature communautaire peut être valable un temps, chaque singapourien ayant un travail et un logement décent, les sociétés des expatriés payant pour. S’il y a autant de juges corrompus, leur mise à la retraite n’était peut être pas une mauvaise idée. S’entourer de gens fidèles en qui on a confiance,pourquoi pas etc etc etc

  6. @Waline

    Les exemples donnés dans le message du 15 février auquel vous avez répondu montraient quelques agissements sous le gouvernement socialiste précédent … Vous préférez ? Surtout ne répondez pas, restons en là.
    Chacun a le droit de ses choix politiques ..

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