Mis sur la sellette, le Fidesz du Premier ministre hongrois Viktor Orbán a claqué la porte du Parti Populaire Européen (PPE) ce mercredi.
Le feuilleton semble connaître son épilogue. Le journal porte-voix de la droite hongroise, le Magyar Nemzet, a annoncé ce matin le départ du parti de Viktor Orbán du groupe parlementaire du PPE, confirmé par la vice-présidente du Fidesz, Katalin Novák.
« Nous ne laisserons pas nos eurodéputés être bâillonnés ou entravés dans leur capacité à représenter leurs électeurs. […] Par conséquent, après l’adoption des nouvelles règles dans le groupe PPE, le Fidesz a décidé de quitter le groupe », a twitté Katalin Novák.
Dans une lettre ouverte adressée au Président du Groupe PPE au parlement européen, Manfred Weber, Viktor Orbán qualifie le vote du PPE de « manœuvre clairement hostile à l’encontre du Fidesz » et ajoute qu’il s’agit d’une décision « antidémocratique, injuste et inacceptable ».
Cette décision fait suite au vote, mercredi à 9h30 à Bruxelles, en faveur d’un changement de fonctionnement, proposé le 26 février par Manfred Weber, facilitant les règles de suspension et d’éviction d’un parti membre. Le résultat est sans appel : 148 membres ont voté pour, 28 contre et 4 se sont abstenus.Viktor Orbán avait prévenu, dans une lettre ouverte à Manfred Weber le 28 février, que son parti quitterait immédiatement la grande formation de droite si les règles proposées étaient adoptées.
We will not let our MEPs be silenced or limited in their capacity to represent our voters. Tackling the pandemic and saving lives remains our number one priority. Therefore, following the adoption of new rules in the @EPPGroup, #Fidesz has decided to leave the Group. pic.twitter.com/WSx1PmtKQ8
— Katalin Novák (@KatalinNovakMP) March 3, 2021
Un différend qui remonte à 2019
C’était il y a quasiment deux ans. En mars 2019, le gouvernement hongrois décidait de lancer une de ces campagnes d’affichage dont il a le secret. Cette fois, aux côtés de l’habituel George Soros se trouvait Jean-Claude Juncker, alors président de la Commission européenne issu du PPE. Sous leurs visages ricanants s’affichaient des slogans hostiles à Bruxelles – des attaques difficilement tolérables par le PPE.
Manfred Weber avait conditionné le maintien du Fidesz à trois choses : des excuses immédiates, l’arrêt des attaques contre l’Université d’Europe centrale et la fin du Bruxelles bashing en Hongrie. Finalement, des excuses et le retrait des affiches auront suffi : le Fidesz n’est pas exclu, seulement suspendu, et le parti se débarrasse du problème en annonçant le régler une bonne fois pour toutes après les élections européennes. De ce compromis qui ne satisfait personne tout en arrangeant tout le monde, c’est bien le Fidesz qui sortait gagnant. Aussi, après l’exil de l’Université d’Europe centrale à Vienne, le Bruxelles bashing poursuivait son cours.
Le Fidesz a même paru en sortir renforcé. Pour de nombreux observateurs, Viktor Orbán n’est pas étranger à l’éviction de Manfred Weber de la course à la présidence de la Commission européenne. Puis, l’impuissance de Donald Tusk, fraîchement élu à la tête du PPE et adversaire politique déclaré d’Orbán, renforçait également l’impression d’impunité du Premier ministre hongrois et de son parti.
Las, un sérieux coup est porté au Fidesz avec le scandale József Szájer, une personnalité historique et influente au sein du Fidesz, l’homme de terrain d’Orbán à Bruxelles. Après sa démission, Orbán a subi d’autres défections dans ses rangs bruxellois. Judit Varga a définitivement quitté la Belgique pour se concentrer sur son portefeuille de ministre, tandis que Péter Gottfried, décrit comme un homme de l’ombre important du Fidesz dans la politique européenne, a aussi rejoint Budapest pour ne travailler qu’au sein du Conseil Monétaire Hongrois. Enfin, le Fidesz doit aussi se passer de Tamás Deutsch, le chef de la délégation Fidesz-KDNP au parlement européen, qui avait jeté de l’huile sur le feu en comparant Manfred Weber à la Gestapo.
La question se pose maintenant de savoir quelle famille va rejoindre le Fidesz. Selon l’hypothèse la plus probable, le Fidesz pourrait rejoindre le Parti des conservateurs et réformistes auquel appartient le Droit et justice (PiS) polonais. Une récente lettre adressée par Viktor Orbán à Giorgia Meloni, qui dirige le parti italien Frères d’Italie (Fratelli d’Italia), accrédite cette hypothèse.