En Hongrie, une nouvelle grande manifestation anti-gouvernementale se déroulera ce mercredi à 17h30 sur la place des Héros à Budapest. Le pouvoir se fait menaçant et les signes inquiétants se multiplient.
Le militant anti-gouvernemental Márton Gulyás a été arrêté par la police à son domicile mardi au petit matin, raconte sa compagne à 444.hu. Il a été placé en garde à vue 72h, suspecté d’avoir jeté de la peinture sur un officier de police lors de la manifestation de lundi soir devant la présidence puis au siège de la Radio publique. Mardi après-midi, quelques centaines de manifestants ont fait face à la police devant le bureau de Péter Polt, le procureur général de Hongrie, puis dans la rue Gyorskocsi à Buda où Gulyás a été transféré. « Marcit ki, Orbánt be! » (Libérez Márton, enfermez Orbán) ont scandé les manifestants.
Pour la première fois, un sentiment se diffuse selon lequel le risque de dérapage existe désormais et que l’extrême polarisation dans laquelle se trouvent la société et la vie politique hongroise pourrait prendre une tournure qui dépasse la violence symbolique et verbale qui a cours depuis une décennie en Hongrie.
« Nous serons aussi dans les rues, afin de défendre ce qui est important et sacré à nos yeux »
Zsolt Bayer, l’un des cofondateurs du Fidesz qui est aujourd’hui un journaliste-polémiste très populaire dans les milieux nationalistes, menace directement les manifestants en ces termes : « Nous pouvons confirmer que d’ici peu, nous serons aussi dans les rues, afin de défendre ce qui est important et sacré à nos yeux. Et nous serons en colère. Donc, vous pouvez continuer encore un peu à faire rage dans les rues, essayer de vous introduire dans le Parlement, les ministères, le siège du parti Fidesz, et les bureaux du président, vous pouvez encore pour le moment attaquer la police ou des journalistes. Mais alors vous comprendrez ce que cela signifie d’être persécutés et menacés. Comme je l’ai dit : nous sommes très en colère. Vous saisissez ? ».
Ce ne sont pas des menaces à prendre à la légère. Zsolt Bayer avait compté parmi les principaux organisateurs des « Marches de la paix » qui avaient réunies en 2012 jusqu’à plusieurs centaines de milliers de partisans du Fidesz sous la banderole « Nous ne serons pas une colonie ». Il s’agissait alors de défendre la souveraineté de la Hongrie supposément menacée par les forces insaisissables du FMI. Que pourrait-il se passer dans la rue face à un ennemi de chair et d’os ?
La lecture du journal porte-voix du gouvernement, Magyar Idők, se révèle tout aussi inquiétante. Un article publié lundi titre avec brutalité sur la « cinquième colonne » (AZ ÖTÖDIK HADOSZLOP) représentée par l’ONG Comité Helsinki, dont on comprend immédiatement qu’il vise en réalité les manifestants. Le journal explique que « la guerre fait rage entre les forces démocratiques désargentées et la minorité agressive des forces impérialistes libérales immensément riches ». Il achève son brûlot par ces mots : « En temps de guerre, les règles de la guerre doivent être appliquées parce que c’est le seul moyen de conduire la vérité à la victoire. »
La haine n’est pas l’apanage de la droite. Une colère sourde monte au sein de la société, estime le philosophe G. M. Tamás dans un texte daté du mois de février : « L’explosion peut survenir n’importe quand et les incendiaires ne se doutent pas encore que dans quelques minutes ils le seront. Celui qui prête l’oreille aux conversations dans les trams qui vont dans les banlieues, dans les trains des lignes secondaires, dans les magasins bon marché, sait à quoi je pense. »