Un sondage de l’institut Szonda Ipsos, publié vendredi dernier sur le site fn.hu, révèle que la moitié de la population hongroise s’attend à une détérioration des relations entre Roms et non-Roms. Cette étude intervient quelques jours après une sérieuse altercation entre membres du groupe paramilitaire « Magyar Gárda » et de la communauté rom.
51% des 800 personnes sondées estiment que les relations communautaires entre la majorité hongroise et la minorité Rom vont empirer dans un futur proche. 30% d’entre elles ne s’attendent pas à une évolution significative, tandis que 7% font preuve d’optimisme, estimant que les liens entre les deux communautés vont se resserrer.
Un peu plus de la moitié des sympathisants du parti de droite Fidesz (52%) et 43% de ceux du parti socialiste MSzP s’attendent à une détérioration des relations communautaires. Sans surprise, ce sont les sympathisants du parti d’extrême-droite Jobbik qui sont les plus enclins à prévoir une escalade dans le conflit (76%) entre Roms et non-Roms. La stratégie de provocation du Jobbik, un parti anti-Roms qui alimente la peur et les ressentiments vis-à vis de cette communauté, fonctionne, semble-t-il, parfaitement.
Ce sont les moins de trente ans, les étudiants et les chômeurs qui apparaissent les plus pessimistes. La moitié des répondants a déclaré ne pas savoir quel parti politique serait le plus à même de gérer les tensions actuelles. Parmi les partis cités, le Fidesz recueille la confiance de 20% des personnes interrogées, contre 8% pour le parti socialiste et le Jobbik.
Un incident qui aurait pu « tourner à la tragédie »
Quelques jours avant ce sondage, le 15 novembre, la tension est dangereusement montée entre Roms et sympathisants de l’extrême-droite, à Sajóbábony, un bourg de 3000 habitants situé dans le Nord-est de la Hongrie, près de Miskolc. Des membres de la communauté Rom locale ont tenté de perturber -sans succès en raison de l’intervention de la police locale- la tenue d’un meeting du Jobbik, un parti qui prospère en attisant les sentiments anti-Roms qu’ils désignent comme des ennemis du peuple hongrois.
Le lendemain, apprenant que des membres de la Magyar Gárda – sorte de milice créé par le Jobbik dans le but de « protéger le peuple hongrois et ses valeurs » et par ailleurs jugée illégale par la justice hongroise – se dirigeait vers le village, des Roms se sont armés pour leur faire face. Seule une réaction rapide de la police a permis d’éviter un affrontement direct entre les deux groupes. Mais, comme l’a constaté le porte-parole de la police locale, Bertalan Gaskó, « L’incident aurait pu facilement tourner à la tragédie si nous étions arrivé un peu plus tard ».
Le porte-parole du gouvernement hongrois, Domokos Szollár, a estimé que l’action de la Magyar Gárda était « inacceptable » et constituait une provocation à l’encontre de la population Rom locale. Le leader de l’opposition de droite, Viktor Orbán, s’est habilement démarqué des positions du gouvernement qui a, selon lui, échoué à protéger tous ses citoyens et de l’extrême-droite qui tente de se substituer à l’Etat. « Chacun devrait se sentir en sécurité, indépendamment de son origine et de sa condition, et c’est le devoir de l’Etat d’assurer cette sécurité. », a-t-il réagit aux événements de Sajóbábony.
Le « péril démographique » en cause
C’est par le facteur démographique que beaucoup de Hongrois justifient leurs craintes d’une évolution négative des relations avec la minorité Rom. Les cris d’alarme qui dénoncent régulièrement la vitalité de la natalité de la population Rom, en comparaison de la démographie déclinante du reste de la population, entretiennent le pessimisme quant à l’amélioration de la situation économique et sociale du pays, ainsi que la peur d’une dilution de l’identité hongroise dans une société multi-ethnique.
Il est de ce point de vue surprenant de constater que, dans sa dépêche rapportant les résultats de ce sondage, l’agence de presse hongroise MTI avance le chiffre de « presque un million », concernant le nombre de Hongrois d’origine Rom. Ce chiffre marque une rupture avec les « usages » précédents qui faisaient généralement état soit de « 400.000 à 600.000″ soit d’ »un demi-million » d’individus. Au dernier recensement général de la population, en 2001, un peu plus de 200.000 personnes ont déclaré leur appartenance à cette minorité.