L’Organisation du traité de l’Atlantique nord a fêté jeudi 4 avril son soixante-dixième anniversaire, lors d’une cérémonie à Washington. Membres de l’alliance militaire depuis vingt ans, les pays d’Europe centrale sont très divisés sur les questions de défense, notamment vis-à-vis de la Russie.
Les 29 États membres de l’Otan, représentés par leurs ministres des Affaires étrangères, étaient réunis jeudi et vendredi à Washington, là où soixante-dix ans plus tôt, le 4 avril 1949, douze pays d’Amérique du nord et d’Europe de l’ouest avaient fondé une alliance militaire pour contrer l’Union soviétique alors que la Guerre froide pointait son nez. Les quatre pays du Groupe de Visegrád étaient représentés aux cérémonies. La Hongrie, la Pologne et la République tchèque ont également célébré le vingtième anniversaire de leur adhésion en 1999.
« Nous ne voulons pas d’une nouvelle Guerre froide », mais l’Otan n’hésitera pas à assurer sa défense, a martelé mercredi son secrétaire général, Jens Stoltenberg, qui a pointé la Russie comme la « menace » principale, rapporte l’AFP. On le sait, Donald Trump, qui voulait initialement se débarrasser de cette alliance militaire trop coûteuse à son goût, a réclamé à ses partenaires un sérieux effort financier.
Les pays d’Europe centrale ont tous accepté de relever leurs dépenses militaires à 2 % de leur PIB, un effort auquel seule la Pologne consentait déjà. La Hongrie, qui était descendue à un budget militaire inférieure à 1 % de son PIB, a engagé récemment un grand plan de réarmement, « le plus ambitieux depuis cinquante ans », selon l’analyse du spécialiste des questions de défense Ferenc Gazdag, interviewé par nos soins.
Les États-Unis cherchent à se renforcer en Europe centrale
Les États-Unis semblent bien décidés à reprendre pied dans une Europe centrale dont certains pays suscitent sa méfiance. La visite du chef de la diplomatie des États-Unis, Mike Pompeo en Hongrie, en Slovaquie et en Pologne au début du mois de mars n’avait d’autres objectifs pour, que de vendre des armes américaines et resserrer les liens dans une logique de confrontation avec Moscou. « Trop souvent, les États-Unis ont été absents d’Europe centrale. C’est inacceptable. Nos rivaux ont rempli ce vide », avait déclaré Pompeo lors de sa tournée, pointant du doigt la Russie et la Chine.
Varsovie fait preuve d’une loyauté à toute égard vis-à-vis de Washington, allant même jusqu’à réclamer aux Américains l’implantation d’une base militaire – le « fort Trump » – sur son territoire, afin de dissuader les velléités russes dans la région. « Certains aimeraient créer une sorte d’armée européenne pouvant remplacer les forces de l’Otan. Je ne suis pas d’accord avec cela », avait appuyé de son côté le premier ministre tchèque Andrej Babiš, lors d’une rencontre du groupe de Visegrád le 10 mars dernier à Wesoła (Pologne).
« En aucun cas nous ne permettrons la construction de bases militaires d’un autre Etat sur le sol de la Slovaquie »
Et pour cause : Hongrois et Slovaques ont beaucoup plus tergiversé pour signer les accords de coopération militaire par lesquels Washington pourrait déployer des troupes sur leurs sols.
Si les Slovaques sont souvent au diapason des Polonais et des Tchèques sur les questions de défense, Bratislava voit d’un mauvais œil la perspective d’une implantation américaine dans le pays. « En aucun cas nous ne permettrons la construction de bases militaires d’un autre Etat sur le sol de la Slovaquie », s’est ainsi fâché, à la fin du mois de mars, le Parti national slovaque (SNS) qui participe à la coalition gouvernementale. Le chef du Smer-SD au pouvoir, Robert Fico a renchéri en déclarant « qu’il est hors de question de signer un accord qui violerait la souveraineté de la Slovaquie » (TASR).
De son côté, le gouvernement hongrois plaide depuis longtemps pour la mise en place d’une union européenne de la Défense en complément de l’Otan. « Nous ne devons pas tout miser sur l’Otan ; nous devons pouvoir repousser seuls toute attaque armée », avait déclaré le premier ministre Viktor Orbán le 14 février dernier. Après avoir traîné les pieds de longs mois – au grand damne des Américains -, Budapest a finalement accepté de ratifier les accords de coopération avec Washington.
Hier, lors d’une table ronde organisée à l’initiative de l’ambassade de Pologne aux États-Unis, le ministre hongrois des Affaires étrangères Péter Szijjártó a acté ce changement de pied en saluant « une politique américaine basée sur le respect mutuel, loin d’être une ingérence dans les affaires intérieures ».
Les États-Unis cherchent à reprendre la main en Europe centrale