« La Hongrie va connaître une dérive vers les Balkans si elle continue ce jeu dangereux »

Mercredi soir, l’eurodéputé slovaque Pál Csáky, pourtant proche du Fidesz, a durement interpellé les dirigeants hongrois au sujet des « quotas de réfugiés ». Appelant à une sortie de crise par le haut, il s’en est pris à l’attitude de cavalier solitaire d’une Hongrie en voie de marginalisation.

Interrogé sur Hír TV mercredi soir, Pál Csáky, eurodéputé slovaque, membre du Parti de la coalition hongroise (SMK-MKP) réputé proche du Fidesz, s’en est vertement pris à l’attitude du gouvernement hongrois dans son contentieux avec la Commission européenne sur l’accueil des réfugiés, principalement syriens. « Cette philosophie n’est pas soutenable (…) ; même s’il ne faut pas démanteler la barrière frontalière (…), il faut au moins porter secours aux personnes éligibles au statut de réfugié, tel que défini par les conventions internationales, notamment la convention de Genève », a-t-il notamment déclaré. Pál Csáky a appelé la Hongrie à se conformer à la solution proposée par la Slovaquie : le rejet du système des quotas au profit d’un accueil volontaire des migrants, défini et régulé par chaque État.

Foto: SITA/Jozef Jakubèo

Selon le parlementaire originaire de Šahy, le bouclier de Visegrád régulièrement brandi par la Hongrie dans sa guerre contre la Commission européenne, pourrait rapidement se fissurer après les élections législatives allemandes cet automne. Pour Pál Csáky, « ce rêve [selon lequel les quatre de Visegrád pourraient se sacrifier l’un pour l’autre] n’a jamais été et ne sera jamais réalité : les gouvernements slovaque et tchèque se conformeront toujours aux intérêts des Allemands. Si dans un futur proche ça n’était pas le cas, il est certain que les quatre de Visegrád auraient à en payer le prix fort ». Pointant les divergences de vue entre la Hongrie et la Pologne sur la question russe, il a pronostiqué « une dérive vers les Balkans » de la Hongrie si ses dirigeants continuaient « ce jeu dangereux ». « C’est à eux de savoir s’ils voudront continuer de jouer en première division », a-t-il également commenté.

« Le groupe de Visegrád est un groupe de pression dont les membres partagent au moins autant de convergences que de divergences de vues »

Interrogé hier par le site d’information Azonnali sur la cohésion du groupe de Visegrád, Pál Csáky a précisé : « je connais l’opinion des dirigeants tchèques et slovaques sur la question et je sais que la vision de Budapest, selon laquelle l’on pourrait s’appuyer sur le V4 pour rééquilibrer les rapports de force, n’est pas réaliste. Ça ne l’est pas, parce qu’il s’agit uniquement d’un groupe de pression dont les membres partagent au moins autant de convergences que de divergences de vues. »

Au sujet du « triangle de Slavkov » proposé par l’Autriche et dont seraient exclues la Hongrie et la Pologne : « c’est encore flou ce qu’il en adviendra. Quoi qu’il en soit, les Slovaques et les Tchèques n’ont aucun intérêt à entretenir une guerre permanente et paranoïaque contre quiconque », a-t-il estimé. Selon Pál Csáky, l’émergence d’une Europe à deux vitesses pourrait sérieusement marginaliser la Hongrie, sauf « si ses dirigeants adoptaient une politique intérieure et extérieure plus efficace et intelligente ».

Ludovic Lepeltier-Kutasi

Journaliste, correspondant à Budapest. Ancien directeur de publication et membre de la rédaction du Courrier d'Europe centrale (2016-2020) et ancien directeur de la collection "L'Europe excentrée" (2018-2020).

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