Des milliers de personnes ont manifesté mardi à Bratislava et dans plusieurs villes de Slovaquie contre les mesures anti-Covid-19 du Premier ministre Igor Matovič, le jour de la commémoration de la « révolution douce » de 1989.
Plusieurs milliers de personnes ont défié les autorités et l’interdiction des rassemblements publics mardi à Bratislava, mais aussi à Banská Bystrica, Košice et Žilina, en protestation contre les mesures sanitaires drastiques prises par le gouvernement d’Igor Matovič (OL’aNO). Partis de la gare en milieu d’après-midi, les manifestants se sont massés devant le palais présidentiel et le bureau du gouvernement, où la foule a scandé « Matovič est un virus » et « Liberté ! ». Environ un millier de personnes se sont rassemblées à Košice et cinq cents personnes sur la place SNP à Banská Bystrica.
La campagne massive de dépistage menée au début du mois de novembre a été particulièrement mal vécue par les détracteurs du gouvernement. Si le dépistage de la quasi-totalité de la population slovaque se faisait officiellement sur une base volontaire, les citoyens qui refusaient d’y prendre part devaient observer une quarantaine de deux semaines. Il est à noter que cette disposition liberticide a été critiquée par la présidente Zuzana Čaputová.
L’agence de presse TASR a constaté que les manifestations ont également attiré « des ultras du football, des partisans de Marian Kotleba et des communistes ». En effet, devant le palais présidentiel, des députés du Parti d’extrême droite Notre Slovaquie (LSNS) ont prononcé des discours, dont son président Marian Kotleba, suivi par le président du Parti communiste de Slovaquie (Komunistická strana Slovenska, KSS), Jozef Hrdlička.
A l’appel du leader néofasciste Marian Kotleba, la foule a ensuite pris la direction du parlement, la Rada, où c’est cette fois l’ancien premier ministre Robert Fico, à la tête du parti SMER, qui s’est exprimé. Restreindre les droits de l’homme est « la chose la plus simple à faire en temps de crise », a-t-il estimé, tout en revendiquant l’héritage d’Alexander Dubček, figure de proue du Printemps de Prague en 1968, et de son « socialisme à visage humain ».
La police a fait usage à plusieurs reprises de gaz lacrymogènes devant le bureau du gouvernement et a interpelés des manifestants qui ont tenté de pénétrer dans le parlement.
Une trahison de l’héritage de 89
Des représentants du Mouvement pour une Slovaquie décente, qui s’est formé dans le sillage de l’assassinat du journaliste Ján Kuciak, ont commémoré le 17 novembre le 31e anniversaire de ce qui reste dans la mémoire collective slovaque comme la « Révolution douce » (nežná revolúcia). En novembre et décembre 1989, des milliers de personnes avaient protesté contre le régime communiste sur la place du soulèvement national (SNP) de Bratislava.
Des politiciens de la coalition gouvernementale ont exhorté à ne pas laisser l’idéologie communiste et nazie accaparer la mémoire du 17 novembre. « Il est inacceptable qu’aujourd’hui, d’anciens communistes, fascistes et hooligans appellent à la violation de la loi, certains même à la violence et au vandalisme », a déclaré Veronika Remišová, chef du parti Za l’udi (Pour le peuple).
« La révolution n’est pas finie, elle continue en chacun de nous », a écrit pour sa part le Premier ministre Igor Matovič sur Facebook. « Le courage et la bravoure des héros de novembre » ont été bafoués par les manifestants mardi qui ont « complètement volé » le message de la révolution de velours, a-t-il ajouté. « Nous débarrassons la Slovaquie des mafias et de leurs serviteurs. Ils peur ? Ils ont bien raison, ils savent que leurs jours de liberté sont comptés », a menacé le premier ministre.
Au mois d’octobre, des manifestations « anti-Covid » se sont également déroulées à Bratislava et à Prague.