En Slovaquie, la crise sanitaire se double d’une crise gouvernementale

Après le ministre de la santé, c’est le ministre du Travail Milan Krajniak qui a démissionné lundi. Plusieurs partis de la coalition gouvernementale réclament la démission du Premier ministre Igor Matovič.

L’on savait la coalition du Premier ministre Igor Matovič fragile. Il se pourrait bien qu’elle ne passe pas le stress test représenté par la forte recrudescence de l’épidémie de Covid-19 en Slovaquie. Un an après son entrée en fonction, les jours d’Igor Matovič à la tête du gouvernement semblent même comptés.

Deux partis de la coalition exigent en effet son départ, sans quoi ils menacent de quitter la coalition : Liberté et Solidarité (SaS) du ministre de l’Économie Richard Sulík et Pour le peuple (Za Ľudí) de Veronika Remišová.

« Ça ne peut pas continuer comme ça. Seule l’éviction de Matovič pourra sauver ce gouvernement », a déclaré lundi Richard Sulík.

Sas et Za Ľudí estiment que le premier ministre a échoué à répondre à la crise sanitaire. Ils lui reprochent aussi ses méthodes de gouvernance qu’ils jugent désinvoltes.

Ces deux partis ont déjà obtenu la tête du ministre de la Santé, Marek Krajčí, issu du parti (OĽaNO) de M. Matovič, contraint à la démission jeudi. La présidente Zuzana Čaputová a accepté vendredi sa démission et a en même temps chargé le ministre des Finances Eduard Heger (OĽaNO) de prendre ce poste à titre temporaire.

Le Premier ministre Igor Matovič a proposé de se mettre en retrait, mais son parti OĽaNO refuse pour le moment sa démission, estimant avoir répondu aux exigences de ses partenaires en évinçant le ministre de la Santé.

Le psychodrame à la tête de l’État slovaque s’est poursuivi lundi avec la démission du ministre du Travail Milan Krajniak, issu du quatrième parti de la coalition, Sme Rodina (Nous sommes une famille). « Je vois ma démission comme un pas vers la fin de la crise de la coalition », a-t-il écrit dans une lettre au président.

Le même jour, le ministre de l’Économie Richard Sulík, poids lourd de la coalition, a adressé un ultimatum au premier ministre : démissionner avant le 24 mars ou gouverner sans SaS et donc sans majorité au parlement.

Vers des élections anticipées ?

Cette désintégration fait les affaires de l’opposition. L’ancien premier ministre du parti Smer-SD, Robert Fico, réclame la tenue d’élections anticipées. « Des centaines de personnes continuent de mourir inutilement ; À la tête du gouvernement, une personne reste, mais personne ne doute plus qu’elle est folle ; La présidente de la République slovaque est contrôlée par l’ambassade américaine. La Slovaquie est en décomposition totale. Il n’y a qu’un seul remède : la déclaration d’un référendum sur les élections anticipées », a-t-il écrit sur facebook le 11 mars.

A ce stade, les contestataires de la coalition ne réclament pas la tenue de nouvelles élections, qui seraient vraisemblablement remportées par le parti Hlas de Peter Pellegrini, ancien premier ministre et bras droit de Robert Fico avant de créer son propre parti. Selon un sondage publié ce 15 mars par la société AKO, il recueille 25 % d’intentions de vote, contre 13 % seulement pour OĽaNO.

Avec un peu plus de 8 500 décès, la Slovaquie, un pays de 5,5 millions d’habitants, enregistre un taux de mortalité totale supérieur à celui de la France et comparable à celui de l’Espagne. Au début de l’automne dernier, elle n’enregistrait que quelques dizaines de décès dus au Covid-19.

Corentin Léotard

Rédacteur en chef du Courrier d'Europe centrale

Journaliste, correspondant basé à Budapest pour plusieurs journaux francophones (La Libre Belgique, Ouest France, Mediapart).

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