Veillées de manifestations en Pologne en défense des juges

L’opposition se mobilise pour une grande journée de manifestations dans tout le pays mercredi, contre des nouveaux projets de lois du PiS contre l’indépendance de la justice.

Six organisations, dont le Comité de défense de la démocratie (le KOD), la Fondation Helsinki, l’association des avocats Defensor Iuris ou encore l’association des procureurs Lex Super Omnia, prévoient de manifester devant le parlement à Varsovie et devant les tribunaux de plusieurs dizaines de villes, avec pour mot d’ordre : « Les juges aujourd’hui, vous demain ! » (voir la carte ci-dessous).

« PiS déclare une guerre ouverte à la justice indépendante ! Il prévoit la répression contre les juges et les procureurs, y compris leur renvoi ! Il ordonne ouvertement d’ignorer le droit européen ! C’est la fin de la séparation des pouvoirs et une étape vers le retrait de la Pologne de l’Union européenne », déclarent ces organisations dans un communiqué. La Cour Suprême polonaise a en effet estimé, ce mardi, que les projets du PiS pouvaient conduire à faire sortir la Pologne de l’Union européenne.

Jeudi 12 décembre, les députés du PiS ont soumis un projet d’amendement à la Diète permettant de contourner un arrêt pris par la Cour de justice de l’UE au mois de novembre rendant caduque les projets de réforme du gouvernement.

Selon l’amendement proposé, les juges pourront désormais être sanctionnés et même renvoyés de la magistrature pour avoir 1) refusé d’appliquer les modalités d’une loi, sauf si la Cour constitutionnelle a elle-même décrété son caractère constitutionnel ou de sa violation du droit européen ; 2) commis ou encouragé des actes empêchant ou compliquant le fonctionnement de la justice ; 3) remis en question la légalité de l’exercice ou de la nomination d’un juge ; 4) été impliqué dans un acte à caractère politique.

La première clause vise clairement à forcer les juges à soumettre tout doute au bon vouloir de la Cour constitutionnelle, qui est maintenant contrôlée par les juges nommés par le PiS, plutôt que de les envoyer à la Cour supérieure. La clause numéro trois, elle, vise à empêcher les juges d’appliquer le récent jugement de la justice européenne, qui remet en cause l’indépendance de la justice polonaise et l’impartialité d’organes disciplinaires créées par le PiS. En effet, avec cette nouvelle loi, les juges ne pourraient plus utiliser le jugement de la Cour européenne pour questionner l’impartialité des nominations ou avancements de juges. Certains juges font déjà maintenant face à des mesures disciplinaires pour avoir osé le faire.

En ce qui concerne les clauses 2 et 4, leur formulation est si vague qu’elles pourraient être utilisées contre tout juge émettant des doutes retardant l’exercice de la justice, ou bien contre tout juge osant s’exprimer publiquement sur les réformes de la justice. Comme les organes disciplinaires mises en place par le PiS l’ont montré par le passé, le simple fait de revêtir un t-shirt portant le mot KONSTYTUCJA est considéré comme un acte politique. Selon cette nouvelle loi, les juges devront déclarer toute appartenance à une quelconque organisation et devront même déclarer tous leurs comptes et pseudonymes éventuellement utilisés pour commenter sur Internet.

Ce nouveau projet de loi vient renforcer les pouvoirs du Conseil national de la justice (KRS – Krajowa Rada Sądownictwa), l’organe dirigée par des juges nommés par le PiS et réputés comme des proches du ministre actuel de la Justice, Zbigniew Ziobro. Le KRS pourra maintenant convoquer tout juge à tout moment. C’est ce conseil qui a montré un zèle particulier au cours des dix-huit derniers mois pour discipliner tout juge osant se mettre en travers de la route du PiS. La justice européenne a récemment émis des doutes sur l’indépendance de cet organe et a demandé à la justice polonaise de se pencher sur son cas.

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