Le Premier ministre Robert Fico et le leader de l’opposition Richard Sulík se sont offerts hier une passe d’arme au sujet de l’intégration européenne et de l’opportunité d’appartenir au premier cercle d’une Europe à géométrie variable.
« Je trouve ça dangereux que le Premier ministre répète aveuglément que la seule chose qui puisse nous sauver, c’est d’appartenir à la Première ligue [de la construction européenne] », a déclaré hier Richard Sulík, le président du parti libéral d’opposition SaS (Liberté et solidarité). Désignant les pays fondateurs de la Communauté européenne, le dirigeant de centre-droit a cru bon de préciser : « ça n’est d’ailleurs pas la Première ligue, mais une sorte de club sportif local ». La Slovaquie aurait intérêt de se tenir éloignée d’un groupe de pays dont l’objet premier serait l’harmonisation fiscale. Richard Sulík a notamment estimé que son pays devait conserver son avantage en matière de dumping social, un des piliers de la croissance slovaque selon l’économiste de formation.
Les propos de Richard Sulík ont été violemment critiqués par Robert Fico, à la tête d’un gouvernement hétéroclite rassemblant les sociaux-démocrates du Smer-SD et les ultra-nationalistes du PNS. « Notre économie est l’une des plus ouvertes de l’Union européenne et est de plus en plus intégrée à l’économie des Etats membres les plus développés », a-t-il répondu à Richard Sulík. Pour le chef de l’exécutif slovaque, « soit nous restons dans le groupe qui s’intègre le plus rapidement, soit nous allons sur une voie de garage ».
Dotée de l’Euro et dans l’espace Schengen, la Slovaquie est le pays centre-européen le plus lié aux traités de l’UE. Pratiquant la même politique de modération salariale que ses voisins tchèque, polonais et hongrois, le pays semble vouloir prendre la tangente à travers un paquet législatif tournant la page des bas salaires. Le débat qui oppose Robert Fico à Richard Sulík s’explique essentiellement par la perspective d’un renforcement du couple franco-allemand dans un contexte de Brexit et de victoire d’Emmanuel Macron à l’élection présidentielle française. Membre du groupe de Visegrád, la Slovaquie de Robert Fico mise pourtant sur une stratégie européenne intégrationniste à rebours de la tendance euroconservatrice en vogue à Varsovie et Budapest.