Serbie : la longue route vers l’UE

Le 25 Octobre dernier, les 27 ministres des Affaires étrangères européens réunis au Luxembourg ont accepté de transmettre à la Commission Européenne la candidature de la Serbie à l’adhésion à l’UE. Il s’agit d’une étape importante dans la voie de l’intégration européenne pour la Serbie et son président, le pro-européen Boris Tadic (photo). Le processus risque cependant d’être long et semé d’embûches. Premier contre-temps, la Commission Européenne mettra environ un an avant d’accorder – ou non – le statut officiel de candidat à la Serbie.

C’est un signe d’encouragement qu’a envoyé l’UE au gouvernement serbe. Les instances européennes ont souhaité récompenser Belgrade pour son « spectaculaire » rapprochement avec le Kosovo. En septembre dernier, le gouvernement du président Boris Tadic avait accepté, avec l’aide de l’ONU, d’organiser des pourparlers historiques très prochainement avec les autorités Kosovares. Une première depuis l’indépendance du Kosovo, le 17 février 2008.

Les Pays-Bas n’oublient pas Srebrenica

Les compromis faits par la Serbie avec le Kosovo n’ont pas suffi à convaincre tous les états membres de faire de Belgrade un candidat sérieux à l’intégration dans l’immédiat. Le nouveau gouvernement hollandais de Mark Rutte, soutenu par l’extrême droite batave, demeure farouchement opposé à un geste envers la Serbie et exige l’arrestation officielle de criminels de guerre : notamment le Général Ratko Mladic et l’ancien président de la République Serb-Krajina, Goran Hadžić (photo), toujours recherchés par la justice internationale.

Les Pays-Bas sont très sensibles au massacre de plusieurs milliers de musulmans bosniaques à Srebrenica en juillet 1995, et ce pour deux raisons. D’une part, le fait qu’ils accueillent le tribunal pénal pour l’ex-Yougoslavie, et d’autre part, le fait qu’un petit contingent de casques bleus hollandais ait été en charge de la sécurité de l’enclave de Srebrenica au moment des faits. Ces deux raisons leur confèrent donc un certain degré de responsabilité. Soucieux d’oublier celle-ci au plus vite, ils ont obtenu de l’UE un texte en forme de mise en garde à l’égard des autorités serbes afin que ces dernières coopèrent de manière unanime avec le tribunal de la Haye.

L’heure du repenti serbe

Boris Tadic a, semble-t-il, bien compris le message. La semaine dernière, pour faire taire les mauvaises langues affirmant que les 2 criminels de guerre seraient cachés par les autorités serbes, le président a promis 10 millions d’euros pour toutes informations menant à l’arrestation du bourreau de Srebrenica Ratko Mladic (photo).

Jeudi dernier, dans la même idée de redorer l’image du pays, Tadic s’est rendu à Ovcara en Croatie pour présenter les excuses de la Serbie pour le massacre de Vukovar. En novembre 1991, quelques 200 civils et militaires croates avaient été tués par les forces serbes à l’issue de la prise de la ville. Une opération qui, pour les Croates, ne pouvait pas passer inaperçu du côté de Bruxelles.

Le problème des hooligans…

Dans son entreprise d’intégrer l’UE, la Serbie pourrait voir s’inviter à la table des négociations des éléments aussi perturbateurs qu’inattendus: les hooligans. Déjà pointés du doigt dans l’affaire Brice Taton, les fanatiques serbes ont une nouvelle fois défrayé la chronique, le mois dernier, à Gênes lors du match de football Italie-Serbie.

Organisés en bandes paramilitaires, ils ont multipliés les dégradations à l’intérieur et en dehors du stade poussant les autorités italiennes à stopper la rencontre après 6 minutes de jeu seulement ! Ces jeunes, pour la plupart nationalistes et contre l’intégration européenne ont réussi leur coup. Ils ont offert à l’Europe une vilaine image de la Serbie d’autant que la part de responsabilité des autorités serbes s’avère évidente dans ces graves incidents : 169 supporters serbes présents en Italie étaient connus des services de police de Belgrade.

… et du Kosovo

Les récents remous politiques à Pristina qui ont eu raison du président de la république, en septembre, puis du gouvernement, ces derniers jours, pourraient retarder les prémices de rapprochement entrepris par la Serbie avec le Kosovo. Or, l’UE a été claire à ce sujet : à terme, une adhésion de la Serbie à l’UE sera impossible si le conflit autour du Kosovo n’est pas définitivement réglé. Le nouveau gouvernement kosovar qui prendra place après les élections législatives anticipées le 12 décembre prochain, devrait avoir besoin d’une période d’adaptation avant que les tractations reprennent avec le voisin serbe. La partie avec le Kosovo est donc elle aussi loin d’être gagnée pour Tadic et son gouvernement.

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Nicolas Gidaszewski

Cofondateur de Hulala et ancien membre de la rédaction

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