La pandémie de coronavirus est-elle une bénédiction ou une menace pour le président Andrzej Duda, candidat à sa réélection au mois de mai ? Ainsi s’interroge le quotidien Rzeczpospolita, qui dénonce une compétition rendue encore plus inéquitable par la lutte contre le virus.
La campagne électorale qui va déboucher sur les élections présidentielles en Pologne les 10 et 24 mai est lourdement impactée par la menace épidémique qui plane au-dessus de la Pologne comme du reste de la région, jusque-là relativement épargnée. Et le pic épidémique étant attendu dans plusieurs semaines, cela signifie que c’est l’ensemble de la campagne qui va se faire à l’ombre du coronavirus.
Le journal quotidien de centre-droit Rzeczpospolita essaie d’en anticiper les conséquences. Avec les restrictions sur les rassemblements imposées par les autorités, la campagne va naturellement migrer du terrain vers les médias et l’internet. « Limiter les réunions avec les électeurs, transférer la campagne vers les médias et l’Internet, crée dès le départ une lutte électorale inégale », estime Rzeczpospolita, qui entrevoit que les différents candidats à la présidence vont devoir jouer des coudes pour accéder aux antennes de télévision, aux stations de radio nationales, et aux principaux sites Internet. « Un seul candidat n’aura aucun problème avec cela : Andrzej Duda », le candidat du Droit et Justice au pouvoir, le PiS. En effet, avoir muselé les médias publics se révèle aujourd’hui un avantage certain pour les nationaux-conservateurs, favoris de cette élection.
De plus, Andrzej Duda, en tant que chef de l’État, aura le privilège d’être vu en première ligne dans la lutte contre l’épidémie, avec des briefings quotidiens, des messages à la nation, des visites de frontières… Bref, Duda aura le beau rôle, celui de protecteur de la nation face à une menace globale et invisible, laquelle attise par contrecoup les discours de repli déjà véhiculés depuis la crise migratoire de 2015.
Mais le coronavirus est-il pour autant un allié électoral d’Andrzej Duda ? « Pas nécessairement », répond le journal. Cela va dépendre de la gestion de la crise par les autorités. Si la Pologne doit connaitre un scénario italien, ou pire, que le système de santé se révèle incapable de répondre à une crise sanitaire, alors le président candidat Duda en fera les frais. Or, comme l’a fait savoir le directeur de l’hôpital infectieux de Bolesławiec, en Basse-Silésie, qui doit admettre des patients présentant des symptômes de coronavirus, « nous manquons de tout : de masques, de lunettes, de désinfectant ».
Dans de telles conditions, l’opposition, n’aurait aucun mal à pointer le sous-financement du système de santé et des hôpitaux, à rappeler que la Pologne a perdu ces dernières années des dizaines de services de soin et des dizaines de milliers de médecins, ou encore que le gouvernement a alloué en début d’année l’enveloppe mirobolante de 2 milliards de zlotys (environ un demi-milliard d’euros) aux médias publics.