Pédocriminalité dans l’Église : L’heure du grand déballage n’a pas encore sonné en Hongrie

En matière de pédocriminalité, l’Église catholique hongroise n’a pas encore connu de grand scandale, ni mené d’enquête, ni eu de comptes à rendre.

András Hodász aime toujours l’Église, il croit toujours en Dieu et continue d’aller prier à l’église. Mais le sacerdoce, c’est terminé pour lui. Harcelé sexuellement par un prêtre à plusieurs reprises durant son adolescence, le jeune prêtre qui exerçait à la paroisse Szent Mihály à Angyalföld, a décidé de remballer la soutane et les sermons et de briser la loi du silence.

C’est l’affaire Attila Pető, récemment révélée, qui l’a poussé à parler publiquement. Attila Pető a lui aussi subi les agressions sexuelles d’un homme d’Église alors qu’il était jeune adolescent. Il a longtemps cherché en vain à obtenir des excuses de l’institution, mais ne s’est heurté qu’au silence et au déni. L’Église l’a, au contraire, accusé de harcèlement et la justice hongroise l’a récemment reconnu coupable. « Un moment de honte pour notre société, le point le plus bas de notre humanité, quand la victime devient coupable », commente András Hodász.

Dans une longue interview donnée à Telex, András Hodász explique avoir été harcelé sexuellement par un prêtre à plusieurs reprises durant son adolescence. Sans donner les détails de ces agressions, il explique la manipulation dont il faisait l’objet de la part d’un prêtre, et met en garde les familles, car le phénomène passe sous le radar en Hongrie.

Le cardinal Péter Erdő et le prêtre András Hodász. Photo : Paroisse Szent Mihály d’Angyalföld
Un nombre inconnu de victimes

Contrairement à de nombreux pays dans le monde, l’Église catholique hongroise n’a pas connu de grands scandales, et par conséquent elle n’a pas mené d’enquêtes approfondies pour déterminer le nombre de victimes d’abus sexuels commis par des membres du clergé au cours des dernières décennies, écrit Telex. Un comité de protection de l’enfance de l’archidiocèse a toutefois mis en place une plateforme de signalement des abus, difficile d’accès, et promet à toute victime une assistance juridique, psycho-psychologique et spirituelle.

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« C’est douloureux pour moi de voir que l’église, qui est fondamentalement pour le peuple, les pauvres et la société, […] a lâché la main du peuple », dit András Hodász.

L’incurie de l’Église catholique hongroise a-t-elle à voir avec sa grande proximité avec les gouvernements de Viktor Orbán, qui la subventionnent très généreusement, notamment pour la rénovation de ses lieux de culte ? András Hodás prédit que cette relation incestueuse entre l’État et l’Église va accélérer la désertion des églises à l’avenir. Beaucoup de ses amis « très religieux » n’approchent plus des églises, car l’on y trouve désormais essentiellement de la politique, affirme-t-il.

Corentin Léotard

Rédacteur en chef du Courrier d'Europe centrale

Journaliste, correspondant basé à Budapest pour plusieurs journaux francophones (La Libre Belgique, Ouest France, Mediapart).

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