« Pandora Papers » : Andrej Babiš, ses sociétés offshores, sa villa sur la Côte d’Azur

A cinq jours des élections législatives où il joue sa réélection, le premier ministre tchèque Andrej Babiš est gravement mis en cause par les « Pandora Papers ». Il a investi 15 millions d’euros dans de l’immobilier de luxe en France, dans ce qui ressemble fort à des opérations de blanchiment d’argent. 

Les « Pandora Papers », qui révèlent les affaires sombres de plusieurs dirigeants politiques, dont l’Ukrainien Volodymyr Zelensky ou encore Tony Blair, tombent au plus mauvais moment pour le Premier ministre tchèque milliardaire Andrej Babiš.

Andrej Babiš a transféré 381 millions de couronnes, soit 15 millions d’euros, vers des sociétés offshores, par le biais desquelles il a ensuite acheté des biens immobiliers sur la Côte d’Azur, dont le château Bigaud, dans l’arrière-pays cannois. L’opération relève du blanchiment d’argent, estiment des experts consultés par le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) et le média tchèque investigace.cz.

Le début de l’affaire remonte à juillet 2009 quand Andrej Babiš, un homme d’affaires milliardaire à la tête de la société Agrofert, a créé une société dans les îles Vierges britanniques qui a secrètement prêté 15 millions d’euros à d’autres sociétés écrans qu’il possédait aux États-Unis et à Monaco. L’argent a finalement été investi dans l’immobilier français de luxe.

Avec cette somme, l’homme d’affaires, qui n’était pas encore entré en politique, a fait l’acquisition de seize propriétés de luxe en France, dont le Château Bigaud, à Mougins, à quelques kilomètres de Cannes, résidence d’été de la famille Babiš.

Déplacer de l’argent à l’étranger, y compris via des sociétés offshores pour acheter des biens n’est pas illégal mais, comme le souligne « The Guardian », l’origine des fonds est inconnue, tout comme la raison pour laquelle Babiš a choisi une structure inutilement compliquée d’un point de vue fiscal. Le journal britannique ajoute que les experts en criminalité financière consultés ont décrit le schéma comme « un exemple classique de blanchiment d’argent ».

Crédit : Andrej Babiš Page Facebook / via investigace.cz
Crédit : Zuzana Šotová / investigace.cz
5 jours avant les élections

Voilà qui tombe fort mal pour Andrej Babiš, candidat à sa réélection cette semaine, lors des élections législatives des 7 et 8 octobre. Son parti ANO porte un discours populiste et anti-élite qui promettait à son lancement en 2011 de balayer la corruption au sein de la classe politique.

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Andrej Babiš n’a pas tardé à réagir, via son compte Twitter, estimant être victime d’une tentative de déstabilisation en vue des élections. « Et voilà. J’attendais ce qu’on allait sortir juste avant les élections pour me faire du tort et influencer les élections tchèques. Il n’existe aucune affaire du temps de ma présence en politique qu’on peut sortir. […] Je n’ai jamais rien fait d’illégal ni de mal, mais cela ne les empêche pas d’essayer à nouveau de me diffamer et d’influencer ainsi les élections parlementaires tchèques. »

«Je n’ai jamais rien fait d’illégal ni de mal» – Andrej Babiš.

« De la corruption jusqu’au dernier souffle », a réagi Ivan Bartoš, le leader du Parti Pirate. « Les gens doivent payer de hautes hypothèques, mais M le PM s’est arrangé : il cache son argent et s’achète un château. Vous étouffez les firmes, les tracasser avec des broutilles et vous vous conduisez ainsi. Honte à vous ! »

Le leader de la coalition de droite SPOLU, Petr Fiala, a estimé pour sa part qu’« Andrej Babiš doit prouver qu’il a utilisé de l’argent imposé pour la transaction. Sinon, il n’a pas le droit d’être en politique et de s’occuper de l’argent des contribuables ».

Il est encore trop tôt pour savoir à quel point ces révélations des « Pandora Papers » seront préjudiciables au premier ministre candidat. Jusque-là, sa popularité a résisté à différents scandales politico-financiers, dont l’affaire du « nid de cigogne ». Cela pourrait compliquer toutefois encore davantage la formation d’une coalition parlementaire, sa seule chance de se maintenir au pouvoir.  

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