La rencontre entre Matteo Salvini et Viktor Orbán hier après-midi en Hongrie n’a pas fait avancer le projet de rassemblement des forces nationalistes et hostiles à l’immigration à moins d’un mois des élections européennes. Très isolé au sein du PPE, le premier ministre hongrois semble avoir perdu la main au profit du numéro deux italien.
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Les élections européennes 2019 vues par Le Courrier des Balkans et Le Courrier d’Europe centrale |
Budapest – Matteo Salvini et Viktor Orbán se sont rencontrés hier à Budapest, dans le cadre d’une visite du numéro deux italien à son homologue, le ministre hongrois de l’Intérieur Sándor Pintér. Le déplacement, annoncé en marge du lancement de la grande alliance d’extrême droite le 8 avril dernier à Milan, était scruté par l’ensemble de la presse internationale comme le signe d’un resserrement de l’axe nationaliste Rome-Budapest à moins d’un mois des élections européennes.
« Nous soutenons la vision de Salvini pour l’Europe », a déclaré Viktor Orbán en préambule de son intervention en conférence de presse sur les coups de 17h à « Karmelita », surnom de son nouveau quartier général qui domine Budapest. Pour le premier ministre hongrois, « l’Italie est parvenue à faire sur les mers ce que la Hongrie a fait sur la terre ferme », à savoir freiner significativement les flux migratoires en direction de l’Europe. Selon Viktor Orbán, « le succès de Salvini va dans le sens des intérêts hongrois ».
Qualifier son hôte « d’ami », Matteo Salvini n’a pas été avare en amabilités envers le premier ministre hongrois. « La politique menée par Viktor Orbán n’est pas honteuse mais exemplaire », a ainsi estimé le ministre italien de l’intérieur, en tançant une presse trop hostile à ses yeux au maître de Budapest. Minimisant les divergences entre l’Italie et la Hongrie sur la question des quotas de réfugiés, Matteo Salvini a considéré « que le problème, ça n’est pas la façon dont on répartit les migrants illégaux ; le problème c’est d’arriver à une Europe capable d’affronter ensemble les pays du Tiers-monde et de défendre ses frontières ».
Le Fidesz reste au PPE jusqu’à nouvel ordre
Très attendu sur la question du maintien de son parti le Fidesz au sein du Parti populaire européen (PPE), Viktor Orbán a reconnu que sa stratégie d’alliance avec les « forces anti-immigration » « est aujourd’hui minoritaire au sein de cette formation ». Voulant mettre la pression sur le PPE afin d’empêcher son alliance – de plus en plus vraisemblable – avec les libéraux et les sociaux-démocrates au sein du Parlement européen, le premier ministre hongrois a repoussé à après le 26 mai un éventuel départ du Fidesz de la grande famille chrétienne-démocrate européenne.
« C’est nous qui déciderons avec qui nous voudrons travailler » a cherché à se rassurer Viktor Orbán, pris en étau entre un PPE au sein duquel il s’est marginalisé après son « autosuspension » le 20 mars dernier et une alliance d’extrême droite voulue par Matteo Salvini et dont il ne maîtrise pas le périmètre.
L’effet de la conférence de presse étant tombée à plat, avec un fort sentiment de déjà vu, l’image qui restera de la journée est celle des deux dirigeants nationalistes posant, telles des vigies de l’Europe, sur un mirador et devant la grande clôture de barbelés qui court sur 170 kilomètres le long de la frontière externe de l’Union européenne.