Les travailleurs hongrois dans le viseur des nationalistes en Autriche

Le gouvernement autrichien va réduire les allocations familiales pour les travailleurs étrangers des pays voisins, notamment hongrois et slovaques. Une mesure xénophobe vendue de surcroît à coup de propagande…islamophobe. Cherchez l’erreur.

C’est ce que l’on appelle un coup de couteau dans le dos. A compter du 1er janvier 2019, l’Autriche va indexer les allocations familiales octroyées aux travailleurs étrangers sur le niveau de vie de leur pays d’origine, selon une loi votée le 24 octobre. Et c’est le parti nationaliste autrichien ami du Fidesz hongrois, en coalition au pouvoir à Vienne, le FPÖ, qui est à l’origine de cette mesure.

« Le montant des allocations familiales pour les enfants vivant à l’étranger sera ajusté au niveau de vie des pays d’origine. Le gouvernement économisera ainsi 114 millions d’euros, ce qui constitue un pas dans la bonne direction : notre argent pour nos enfants »,

justifie le FPÖ avec une image diffusée sur internet. Outre ce cas flagrant de discrimination contre lequel la Commission européenne se réserve le droit d’intervenir,  ce qui interpelle, c’est que le FPÖ promeut sa mesure xénophobe à l’aide d’un message …islamophobe. En effet, sur plusieurs images diffusées sur internet et facebook, il met en avant une femme à la peau sombre voilée d’un foulard islamique et avec les yeux masqués.

Pourtant, en réalité, ceux qui sont réellement visés par cette mesure ne sont pas issus des pays arabo-musulmans, mais des pays frontaliers plus pauvres issus de l’ancien bloc de l’Est, hongrois et slovaques, notamment. L’hebdomadaire libéral hongrois HVG, qui s’est penché sur les statistiques, est catégorique : les frontaliers Hongrois de la région de Sopron, dans l’Ouest du pays, seront de loin les plus impactés.

L’État autrichien a déboursé sur l’année 2016 des allocations familiales pour 132 000 enfants de travailleurs étrangers au total. Les Hongrois représentent à eux seuls 39 000 d’entre eux, pour un coût de de 80 millions d’euros. Viennent ensuite les contingents de travailleurs slovaques, polonais, roumains, slovènes et tchèques. Ces six pays représentant 90 % du total des enfants recevant des allocations de Vienne.

Malgré l’évidence, « le FPÖ est fier de couvrir les yeux des femmes musulmanes », dénonce HVG, qui précise aussi que ces allocations familiales que l’extrême-droite veut supprimer sont une prestation sociale versée par l’État à partir des cotisations payées par les employés.

Comment va réagir Budapest à cette violation des droits des citoyens hongrois exploités qui plus est pour une campagne de haine ? interroge HVG. Et de répondre : « Il est peu probable que le gouvernement Orbán agisse contre le FPÖ, devenu tacitement le principal allié du Fidesz depuis que le parti conservateur ÖVP du chancelier Kurz a voté au Parlement européen pour le rapport Sargentini ».

Et voilà comment la belle union entre le Fidesz et le FPÖ, unis au niveau européen par une même islamophobie, pourrait achopper sur une question bêtement…nationaliste.

Le gouvernement de Kurz en Autriche, du sur-mesure pour Orbán

Corentin Léotard

Rédacteur en chef du Courrier d'Europe centrale

Journaliste, correspondant basé à Budapest pour plusieurs journaux francophones (La Libre Belgique, Ouest France, Mediapart).

×
You have free article(s) remaining. Subscribe for unlimited access.