Les cinéastes hongrois craignent pour la diversité de leur art

Le 7 février dernier, un collectif de cinéastes hongrois a publié une déclaration contre la décision du gouvernement de restructurer le système de financement de l’industrie du film en Hongrie.

Le collectif de cinéastes à l’origine de la déclaration publiée par Cineuropa s’inquiète de voir la diversité et la richesse de la production cinématographique hongroise sacrifiée sur l’autel de la rentabilité et d’un contrôle centralisé dénué d’indépendance. « Le gouvernement hongrois a décidé de substituer à une structure autonome démocratique et indépendante garantissant la pluralité des films hongrois un système où une seule personne prend les décisions. A notre avis, cette décision met en danger la nature diversifiée des films hongrois », peut-on lire dans cette déclaration. Ildikó Enyedi, membre du collectif, espère « ne pas voir le retour des conditions d’avant 1989, lorsque les productions cinématographiques dépendaient exclusivement du jugement et de l’appréciation personnels de quelques décideurs. »

Ce collectif, composé de 9 cinéastes hongrois – Ildikó Enyedi, Benedek Fliegauf, Szabolcs Hadju, Miklós Jancsó, Ágnes Kocsis, Márta Mészáros, Kornél Mundruczó, György Pálfi et Béla Tarr – est également soutenu par plusieurs dizaines de cinéastes étrangers, parmi lesquels Gus Van Sant, Michael Hanneke ou encore Luc et Jean-Pierre Dardenne.

Un champion du box-office US à la tête du cinéma hongrois

Au cours des 20 dernières années, c’est la fondation cinématographique hongroise – organisme indépendant composé de professionnels du cinéma- qui était en charge de l’attribution des fonds aux différents projets. Mais en 2010, la fondation est devenue insolvable et donc incapable d’assurer ses fonctions budgétaires. Le premier ministre Viktor Orbán a alors décidé de nommer un commissaire responsable du système de financement de l’industrie du film, en la personne d’Andrew. G. Vajna, le plus hollywoodien de tous les Hongrois.

On lui doit notamment des blockbusters tels que Total Recall ou encore Rambo. Nommé pour deux ans, Vajna a exposé les grandes lignes de son plan de restructuration lors du Forum du Cinéma Est-Européen qui s’est tenu dimanche 13 février, dans le cadre de la Berlinale, Festival du film international de Berlin. Sa priorité est d’évaluer les actifs de l’industrie cinématographique hongroise, de créer un cadre légal, en accord avec les lois hongroises et celles de l’UE afin de parvenir à un système exploitable. Vajna a également exprimé le souhait de voir les cinéastes travailler avec lui, ce qui serait dans leur intérêt, selon lui.

La nomination de Vajna est vivement critiquée par les cinéastes, qui avancent son passé hollywoodien et son inexpérience de l’industrie européenne du film et de son mode de financement. L’intéressé répond qu’il est ouvert aux discussions et prêt à entendre critiques et inquiétudes concernant le nouveau poste qu’il occupe. « La situation est absurde, il n’y a pas de communication entre la profession et les preneurs de décisions depuis neuf mois (arrivée au pouvoir du gouvernement de Viktor Orbán, ndlr), nous ne savons même pas quel ministère gère le cinéma », résume Béla Tarr, le plus célèbre d’entre eux, cité par MTI.

 

Isma Hassaine Poirier

Journaliste

Membre de la rédaction de Hulala. Correspondante basée à Londres. Diplômée en science politique et en journalisme. Spécialisée en actualité politique et sujets de société.

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