
A l’occasion de son passage à Paris la semaine dernière, le Premier Ministre Hongrois en a profité pour tenir une conférence à l’Institut Français des Relations Internationales, afin d’y parler de la situation de son pays, de la présidence tournante de l’Union Européenne qu’il dirigera pour 6 mois à partir de janvier prochain, et du rôle de l’Europe Centrale dans l’UE. C’est un Orbán très différent de celui auquel nous sommes habitués en Hongrie qu’a pu entendre la rédaction de Hulala lors de la conférence jeudi dernier.
Très loin de l’image populiste qu’il se donne dans son pays d’origine, nous y avons découvert un Orbán pro-européen tenant un discours précis et clair sur les projets de la présidence hongroise de l’UE. C’est dans un anglais aisé qu’Orbán décide de s’adresser à l’auditoire avant de continuer en hongrois. Si l’on en croit le Premier Ministre dans son discours bien rôdé, la présidence hongroise de l’UE sera très active. Avec une volonté européenne sincère, Orbán voit grand avec un nombre important de projets, dont certains dépassent largement le cadre des 6 mois de la présidence. A ce titre il a expliqué avoir déjà rencontré des membres du gouvernement belge (à qui la Hongrie va succéder à la présidence), mais surtout des représentants polonais et danois (qui succéderont la Hongrie), afin qu’ils puissent s’accorder sur un programme commun à long terme.
« Il faut compléter l’Union »
Orbán a expliqué être en faveur de l’élargissement de l’espace Schengen et de l’UE, même si selon lui, il y a en ce moment un climat hostile a tout élargissement. La Hongrie est partisane de l’agrandissement de l’espace Schengen, a affirmé le Premier Ministre. Orbán est non seulement en faveur de l’entrée de la Croatie dans l’UE, mais ce serait déjà « une affaire terminée », selon ses propres mots. « Il faut compléter l’Union » a répété Orbán. Egalement favorable à l’entrée des pays balkaniques au sein de l’UE, la question est celle de savoir « comment » les intégrer, selon le PM, et pas celle de savoir s’il faut ou non les faire rentrer dans l’UE. « Sans ces pays, l’Union Européenne n’aurait pas de perspective » et les Balkans deviendraient une région de crise, a ajouté Orban, sans en dire plus, mais pensant probablement aux questions de sécurité énergétique européenne et au couloir géographique qu’ils représentent dans cette perspective.
L’énergie au centre, les Roms en périphérie
Au sujet de l’épineux problème de l’énergie, Orbán n’a pas manqué de rappeler que la Hongrie puise 80% de ses besoins en gaz de la Russie, et a regretté qu’aucun projet de diversification des sources énergétiques ne soit prévu, avant d’ajouter ne pas avoir beaucoup d’espoir à propos de Nabucco. Il a expliqué que le moment n’était pas loin où l’UE allait avoir un « arrangement » historique avec la Russie, et qu’à ce propos il devait bientôt rencontrer le Premier Ministre russe, Vladimir Poutine. Orbán, tout en restant vague car le projet n’est pas encore entièrement établi, a répété que si jamais il aboutissait l’Europe devrait exiger de nombreuses garanties. Sans jamais nommer directement le projet, nul doute qu’Orbán pensait à South Stream en disant cela, projet de gazoduc rival à Nabucco.
Ainsi qu’il l’avait déjà dit lors d’une interview accordée au Figaro, Orbán a été bref et précis à propos de la question des roms : d’ici la fin de la présidence hongroise de l’Union Européenne (juin 2011), il faudra qu’une politique européenne concernant les roms soit établie. Tâche qui reviendra donc à l’équipe du Premier Ministre hongrois.
L’économie hongroise et le FMI
A propos de la situation actuelle en Hongrie, Orbán s’exprime avec beaucoup d’emphase. Il a qualifié la politique de ces dernières années en Hongrie de « cynique » et « sceptique », et parle même d’une « décadence que nous [les hongrois] avons vécus ». Il explique que face à cet « échec », une solution arrive avec « l’élection récente du Fidesz ». La Hongrie peut désormais « commencer à guérir les maladies civilisationnelles », grâce à la « révolution des 2/3 ». Ce sera la seule partie de son discours qui ressemble à ceux qu’il peut tenir en Hongrie, même s’il concède toutefois que « nous sommes reconnaissants à l’égard du FMI ».
Sur la plan intérieur, il a exprimé sa volonté de réduire l’endettement de la Hongrie de 80 à 70%. Il a expliqué ne pas être « idéologiquement » contre le FMI, mais préférer financer la Hongrie par le marché et ne pas vouloir baser l’économie de son pays sur une telle aide. Le Premier Ministre a même dit être globalement d’accord avec le discours du président du FMI, Dominique Strauss-Kahn, tenu lors de la dernière assemblée. A la question de savoir s’il accepterait l’aide du FMI si jamais la Hongrie en avait de nouveau besoin, Orbán a répondu par l’affirmative. Après les nombreuses critiques du Fidesz envers le précédent gouvernement pour avoir accepté l’aide du FMI, Orbán semble avoir retourné discrètement sa veste et fait preuve d’un peu plus de réalisme.
Malgré tout cet enthousiasme du côté hongrois, il est encore difficile de s’informer sur cette présidence sur la toile, leur site n’étant toujours pas en ligne.
Articles liés :
Sur la Hongrie du Fidesz
La Hongrie, vers une «démocratie dirigée» à la russe
Biographie : La revanche de Viktor
Selon Jobbik, il n’y a pas de démocratie en Hongrie actuellement
La gauche se rebiffe en «Orbanie» !
Les Hongrois, ces grands fascistes !
Médias : retours (non négociés) aux choses sérieuses
Sur l’Union Européenne
UE : L’opération séduction de Viktor Orban
Le budget 2011 de l’UE reste inconnu
Présidence de l’UE : la Hongrie est-elle prête ?
La Hongrie prépare le terrain pour présider l’Europe en 2011
Sur les questions énergétiques
UE – Nabucco : les infidélités des européens avec South Stream
Nabucco, un consortium bien optimiste
La Russie réaffirme son leadership de l’énergie en Hongrie
A Budapest, le froid entre Kiev et Moscou impose un remede rapide
Une stratégie énergétique régionale pour en finir avec l’Ukraine
Nabucco, l’esquive du gaz russe
Notre Napoléon des Carpathes a sans doute du mal á avaler les ordres venus de plus haut (d`ou exactement?), selon lesquels il est temps de remettre le Nabucco en poche avec un gros mouchoir par-dessus, au profit du South Stream russe. Apres tout, il y a encore peu de temps, Orbán the Great était le plus acharné a vendre la peau de l`ours South Stream en bon champion de Nabucco et maintenant vlatipas qu`il est obligé de faire bientot des ronds de jambe devant Putin. On ne devrait jamais confier le sort d`un état á un footballeur. 🙂
Á propos, cette maniere hautaine de serrer la pince au premier ministre francais, c`est pas piqué des hannetons non-plus hein? On dirait G.W. Bush recevant le premier de Costa Rica ou le grand timonier Mao recevant un politicien mongole hehe.. Heureusement Fillon est bon prince, il laisse rien paraitre mais probable qu`il a pris note.