La police a procédé à l’arrestation du maire adjoint de Prague, Petr Hlubuček, et d’une dizaine de présumés complices, tous accusés d’avoir extorqué des pots-de-vin en échange de contrats de construction octroyés par la compagnie de transport public.
Le 15 juin, les enquêteurs de la « Centrale nationale contre le crime organisé » ont effectué des perquisitions dans les bureaux de la mairie de Prague et dans plusieurs bureaux et domiciles. Neuf personnes ont été arrêtées dans la foulée, tandis que quatre autres sont encore recherchées.
Avec l’aide de lobbyistes connectés au monde politique, Petr Hlubuček, maire adjoint de Prague, aurait, selon la police, monté un groupe criminel organisé pour forcer des entreprises de construction à leur verser des montants allant jusqu’à 200 000 €.
Par l’entremise de leur homme au conseil d’administration de la Compagnie de transport (chargée des transports publics à Prague), ils menaçaient les entreprises de bloquer leur participation à des projets de construction publics.
Démission du ministre de l’Éducation
Petr Hlubuček a démissionné sans attendre. Mais son parti STAN (Maires et Indépendants), qui est au pouvoir dans la municipalité et au niveau national, en sort fortement éclaboussé. Ce parti de centre-droit a été fondé en 2008 par des politiciens municipaux et régionaux de divers horizons et actif localement avant de se lancer sur la scène nationale en 2017.
Depuis quelques jours, les révélations se multiplient sur les liens entre le parti et les lobbyistes impliqués. Notamment, les détails de l’enquête révèlent l’existence d’un groupe d’hommes cyniques intriguant affublés de pseudonymes sur des messageries chiffrées. Des enregistrements de la police ont filtré dans la presse dans lesquels on les entend parler de drogue et de sexe, et rigoler à propos l’argent qu’ils s’apprêtent à voler.
Niant, le temps de quelques jours, avoir passé des vacances chez Michal Redl, le lobbyiste complice de Hlubuček, le ministre de l’Éducation, Petr Gazdík (STAN), a finalement avoué et remis sa démission à son tour dimanche 20 juin.
Vít Rakušan, patron de STAN et ministre de l’Intérieur, joue la carte de la franchise et met en avant sa volonté de faire le ménage. Il a vanté l’empressement de son parti à faire face au scandale, par opposition au déni auquel l’ex-premier ministre Andrej Babiš a habitué ses électeurs.
Plombé à quelques mois des municipales
Tout n’est pas encore tiré au clair pour autant. Il reste notamment des zones d’ombre en ce qui concerne l’éventuelle implication de la direction du parti, qui semble avoir largement profité des dons des personnes visées par la police. Samedi, STAN annonçait qu’il rendrait environ 12 000 € en dons reçus de l’entourage de Redl, mais le journal Deník N révélait le même jour que la somme totale des dons depuis 2016 avoisinerait plutôt 120 000 €.
Le ménage peut-il être fait et les électeurs peuvent-ils pardonner à STAN d’ici les élections municipales prévues cet automne ? Il n’est pas exclu que l’histoire connaisse encore de nombreux rebondissements, d’autant que les lobbyistes impliqués entretenaient de nombreux liens avec les autres partis de droite du gouvernement, ODS et TOP 09.
Depuis mercredi, l’opposition menée par Andrej Babiš et son parti ANO tirent à boulets rouges sur les partis impliqués et rappellent qu’il avaient averti les électeurs des risques liés au retour au pouvoir de la droite, impliquée dans de nombreux scandales avant 2013.
Les alliés de STAN à la mairie pragoise, à savoir les Pirates et le groupe civil Praha Sobě, forcément embarrassés, sont toutefois hors de cause. C’est leur député de Praha Sobě responsable du transport, Adam Scheinherr, qui a été à la source de l’enquête, après avoir déposé une plainte il y a deux ans, un laps de temps pendant lequel ils ne pouvaient s’exprimer publiquement sans compromettre l’enquête.
Photo d’illustration : Mairie de Prague (Che / Creative Commons)