« La Hongrie n’est pas une colonie française ! »

Depuis que Viktor Orbán et Emmanuel Macron se sont désignés mutuellement comme ennemis en Europe, les relations s’enveniment entre la France et la Hongrie.

« Nous nous opposons à ceux qui nous expliquent sur un ton colonial qui a droit ou non aux financements de l’Union européenne », a déclaré le ministre des Affaires étrangères et du Commerce, Péter Szijjártó, lors de l’émission du jeudi soir de la télévision publique hongroise M1.

« La Hongrie n’a jamais été une colonie française et elle ne l’est pas davantage aujourd’hui, et les financements de l’Union européenne sont dus à la Hongrie sur la base d’accords. La contrepartie de ces accords, c’est que la Hongrie a ouvert son marché, ce qui a profité aux entreprises occidentales », a expliqué le ministre.

Il répondait ainsi abruptement aux déclarations toutes aussi brutales de son homologue français, le ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian, lors de la conférence des ambassadeurs à Paris fin août.

Visant la Pologne et la Hongrie, il a dénoncé « une approche utilitariste de l’Union, dans laquelle ils ne choisiraient que ce qui les intéresse, et en premier lieu la redistribution d’argent ». « Nous ne sommes pas prêts à payer pour cette Europe-là ».

« Chaque État membre est libre d’élire les dirigeants qu’il souhaite, mais notre vision de l’Union européenne comme cercle premier d’alliance et de valeurs n’est pas compatible avec des gouvernements qui n’en respectent pas les principes fondamentaux, ne se sentent aucunement liés par la solidarité communautaire », a aussi déclaré le ministre français.

La tension était déjà perceptible entre Paris et les capitales centre-européennes, qui s’opposent sur la question épineuse du prochain budget européen 2021-2027. Des Etats voudraient conditionner l’octroi de fonds européens au respect de l’Etat de droit et des « valeurs européennes », mais la Commission européenne peine à définir ces notions qui ne font pas consensus, et à se doter de mécanismes adéquats.

Elle est montée d’un cran la semaine dernière lorsque Viktor Orbán et Matteo Salvini, nouvel homme fort du gouvernement italien, ont désigné le président français comme le « leader du mouvement pro-migration » et leur principal adversaire aux élections européennes de 2019.

Jeudi, lors d’un débat sur l’Union européenne au Luxembourg, Emmanuel Macron en a remis une couche : « On doit faire respecter l’état de droit partout, on a été trop lents, on a trop transigé. […] Il faut être beaucoup plus durs sur ces sujets. Il y a la semaine prochaine un débat au Parlement européen sur le cas de la Hongrie, je suis pour qu’on soit clairs, que les parlementaires européens prennent leurs responsabilités ».

Viktor Orbán, à qui l’on prête des ambitions européennes, se pose en adversaire de la Commission européenne et dit vouloir se débarrasser de l’élite « soixante-huitarde » et libérale. Emmanuel Macron se présente de son côté comme le rempart contre la poussée nationaliste que connait le continent et dont la Hongrie a été précurseur, rejouant à l’échelle européenne son match contre Marine Le Pen en finale de la présidentielle 2017.

Viktor Orbán versus Emmanuel Macron : chacun joue sa partition

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