La Chine prêtera à la Hongrie 85% des 2,4 milliards d’euro alloués à la portion hongroise de la LGV Budapest-Belgrade. Celle-ci reliera à terme la capitale hongroise au port grec du Pirée, porte d’entrée de la Chine en Europe.
La Hongrie aura bientôt sa première ligne à grande vitesse. Signe des temps, elle ne raccordera pas Budapest à Vienne, mais au port grec du Pirée, la nouvelle porte d’entrée de la Chine en Europe. L’avis de marché public pour la rénovation complète de la portion hongroise de 158 km du « Budapest-Belgrade » a été publié hier sur le site de la compagnie d’État des chemins de fer (MÁV). 2,4 milliards d’euros (750 milliards de forint) seront alloués au projet : la maîtrise d’ouvrage sera assurée par la MÁV et la maîtrise d’œuvre confiée à une société ad hoc hongro-chinoise (Kínai-Magyar Vasúti Nonprofit Zrt.). 85% du financement est assuré indirectement par l’État chinois, à travers un prêt à un taux inconnu, consenti via la banque chinoise d’importation et d’exportation à son homologue hongroise.
Si le projet est dans les cartons depuis décembre 2014, son périmètre budgétaire et le calendrier de mise en oeuvre ont été dévoilés hier par le Premier ministre chinois Li Keqiang, au cours d’une conférence de presse avec son homologue hongrois Viktor Orbán en marge du sommet du « format 16+1 » à Budapest.
La ligne Budapest-Belgrade devrait conserver sa capacité voyageurs, mais la finalité de cet investissement monstre est ailleurs : elle porte sur le transport de marchandises entre la Chine et l’Europe, via les ports de Shanghai et du Pirée. La vitesse commerciale de la ligne devrait être portée à 160 km/h et ainsi ramener à 3h30 (contre 8h actuellement) le temps pour relier les capitales serbe et hongroise. Le gouvernement hongrois n’a pas avancé de date précise pour l’échéance, mais les principaux observateurs estiment à trois-quatre ans l’horizon de la réalisation.
La presse hongroise s’est montrée globalement critique à l’égard du projet, en raison principalement de son coût très important et des zones d’ombre qui planent sur les conditions d’attribution du marché public. La portion Budapest-Kelebia devrait coûter 15,25 millions d’euros au kilomètre, soit par exemple le double de la rénovation de la ligne Kelenföld–Százhalombatta. Ramené aux chantiers de ligne à grande vitesse en France, le projet hongro-chinois reste pourtant dans les clous des projets de cette nature (la LGV Méditerranée avait ainsi coûté près de 20 millions d’euro au kilomètre).
Côté chinois, cet investissement en Hongrie est à considérer dans le cadre beaucoup plus large du projet de développement dévoilé en 2013 de « nouvelle Route de la soie » (connu sous l’acronyme OBOR pour One Belt, One Road) qui doit permettre à la Chine de se projeter vers l’Ouest du super-continent eurasiatique.