Tesco, enseigne britannique de grande distribution, est la première chaîne de supermarchés en Hongrie. Elle est aussi la première à accuser publiquement le gouvernement hongrois de vouloir saper la croissance dans le secteur. En réalité, au-delà des pleurnicheries, les grandes enseignes étrangères de la distribution se sont surtout fait avoir par leur propre logique globalisante du domaine de la vente au détail. Ils apprendront que le gouvernement de Viktor Orbán n’est pas réputé conservateur pour rien.
Sous le coup de la deuxième vague de taxes temporaires lancée cette semaine, Tesco fustige le gouvernement en avançant que ce sont directement les investissements et les emplois qui vont trinquer. L’Etat, lui, reste de marbre et s’attend à percevoir 30 milliards de forints (109 millions d’euros) de la part des grandes chaînes de magasins en 2010, et pour les deux prochaines années. Le président de l’Association des détaillants, György Vamos, ne s’est pas encore risqué à commenter les déclarations du côté de Tesco.
Un taux qui varie d’une semaine à l’autre
Quelque part, on peut comprendre l’agacement de certains lorsqu’une semaine sur l’autre, le taux d’imposition entre l’annonce et la taxation effective prend 0,5 %. La semaine dernière, le ministre György Matolcsy avait déclaré que la taxe serait de 0,1 % pour les sociétés dont le chiffre d’affaires annuel net en 2009 se situait entre 500 millions et 100 milliards HUF, et de 2 % pour les entreprises ayant un chiffre d’affaires annuel net supérieur à 100 milliards. Cette semaine, si l’on s’en réfère au site officiel parlament.hu, la taxe ne sera plus de 2 % mais de 2,5 % pour un chiffre d’affaires supérieur à 100 milliards de forints. Elle sera de 0,1 % pour un chiffre d’affaires situé entre de 500 millions à 30 milliards HUF, et sera de 0,4 % pour un chiffre d’affaires situé entre 30 et 100 milliards de forints net.
Selon Nepszabadsag cette semaine, la plupart des enseignes concernées perçoivent cette taxe comme une mesure protectionniste et populiste, bien qu’elle survienne après toutes les échéances électorales de l’année. Elle est perçue par beaucoup comme un moyen de consolider les « petits » de la vente au détail, ainsi que les fournisseurs, contre les hypermarchés de chaînes multinationales, dont la position est dominante sur le marché.
Un calcul sur le chiffre d’affaires qui arrange beaucoup les Hongrois
On pourrait donc dire qu’avec son chiffre d’affaires annuel, Tesco pleure pour pas grand chose : il est actuellement le leader de la distribution en Hongrie, avec un chiffre d’affaire record de 602 milliards de forints, soit plus de 2 milliards d’euros en 2008. Toutes les enseignes françaises seront elles aussi taxées à 2,5 %, sans exception. Outre Auchan et Cora, qui comptabilisent un chiffre d’affaires supérieur à 200 milliards de forints par an, Match et Profi auraient pourtant pu croire, avec leurs chiffre d’affaires annuels inférieurs à 100 milliards chacuns, qu’ils allaient être imposés à 0,4 %. Et bien non. Le calcul du gouvernement prend en compte le fait que Match et Profi appartiennent, avec Cora, au même groupe (Delhaise). C’est donc le groupe Delhaise tout entier qui sera taxé à 2,5 %.
Ceux qui perdent le moins dans cette affaire d’impôt sur la grande distribution sont donc les magasins hongrois. Les chaînes locales Réal, CBA et Coop échappent en effet à la taxe à 2,5 % car ces enseignes regroupent en grande partie des magasins franchisés. Ainsi, le chiffre d’affaires réalisé par le siège est moindre par rapport au chiffre d’affaires réalisé par le réseau de tous les magasins. Un réseau absolument omniprésent dans toutes les villes, tous les quartiers et tous les villages de Hongrie. Un coup de maître en matière de « fiscalité nationaliste » donc, réussi par le gouvernement hongrois cette semaine.
C’est ça aussi, l’investissement international.
Un coup, on gagne très beaucoup. L’autre coup, on gagne moins beaucoup.
C’est comme ELF, qui ne versait à l’Etat Gabonais, que 1000 euros par an, pour tout le pétrôle exporté.
Longtemps, ça marche…après, ça se complique.
On va clairement pas pleurer pour TESCO et toutes ces chaînes de grande distribution qui, en plus d’avoir éliminé pas mal de petits commercants, proposent des tarifs élevés pour la plupart de leurs produits. Espérons qu’une telle politique évitera la situation que nous avons en France: un réseau de grandes surfaces en totale monopole sur le marché, plus aucun épicier de quartier si ce n’est quelques épiceries de nuit dans les grandes villes. Pour combler le tout, il y a bien sûr les petits casino qui ne sont rien d’autre que des mini-supermarchés: même prix, même merde.
Dans ce cas précis, je ne crois pas que le gouvernement d’Orban soit « conservateur » comme vous le dites. C’est plutôt inédit comme politique. En juin, lorsqu’Orban a parlé de taxes sur les banques, tout le monde l’a rappelé à l’ordre au sein de l’UE. Or tous les états de l’UE mettent en place maintenant des taxes sur les banques, y compris le Royaume-Uni. Le phénomène est tel que la commission européenne demande à une harmonisation avec les différents états. Est-ce que d’autres gouvernements de l’UE se sentiront inspirés par la taxation sur les bénéfices des supermarchés? Espérons que oui. A partir du 1ier janvier 2011, la Hongrie aura tout le loisir d’expliquer ses idées à ses partenaires européennes puisqu’elle sera présidente de l’UE..
@jaizou_le_sagouin
Il faut lire l’article en détail.
Ce ne sont pas les indépendants qui sont avantagés. Ce sont les distributeurs Hongrois.
En Hongrie, encore plus qu’en France, les prix sont le facteur premier pour les achats et encore plus pour les ménages à -très- faibles revenus. Les distributeurs Hongrois (CBA …) sont au minimum 15% à 20% plus chers et ne peuvent pas proposer les MDD aux mêmes prix que les grandes surfaces.
Conséquence de cette loi? Vous croyez vraiment que les distributeurs vont prendre cette taxe à leur charge?
– Les chaines étrangères vont encore mettre un coup de pression sur les fournisseurs (y compris les Hongrois), qui déjà souffrent et ne sont pas souvent compétitifs, avec le risque de les voir disparaitre.
– Elles vont aussi augmenter leur prix « en harmonie » (pas dur quand la pression est la même pour tous). Pas grave, elles resteront encore moins chères que les distributeurs Hongrois.
Au final, qui va payer? Le petit consommateur Hongrois.
Il ne faut pas oublier que si les commerces de proximité ont disparu, c’est parce qu’ils n’avaient pas assez de client pour survivre: C’est le client qui les a tué … pas les hypermarchés.
Pour offrir une alternative sérieuse, il ne faut pas se tromper de problème et ne pas combattre le mauvais « ennemi » 😉