État de droit : « Il est devenu presqu’un réflexe de mentionner les gouvernements hongrois et polonais »

L’eurodéputé écologiste belge Philippe Lamberts souligne que les cas de la Hongrie et de la Pologne ne doivent pas occulter les atteintes à l’état de droit et le recul des libertés publiques observés ailleurs dans l’Union européenne.  

Philippe Lamberts, eurodéputé Écolo, coprésident du Groupe des Verts/ALE au Parlement européen, nous a autorisé à republier ce texte posté le 1er octobre sur sa page facebook.

En matière de respect de l’État de droit et des libertés publiques, il est devenu presque un réflexe de mentionner les gouvernements hongrois et polonais, dirigés d’une main de fer par Viktor Orbán et Jarosław Kaczyński respectivement.

Si la dérive autocratique de ces deux gouvernements a tout pour choquer, elle ne devrait pas faire oublier celles, plus mafieuses qu’autocratiques, observées en Bulgarie, à Malte, en Roumanie ou en Slovaquie.

Ni plus le recul des libertés démocratiques et la dérive sournoise vers un État policier et de surveillance observées au travers de l’Union : le traitement des migrants ou encore l’affaire Chovanec montre que notre pays [la Belgique – Ndlr.] a du souci à se faire, comme la France en matière de violences policières ou en matière de répression du droit de manifester. La pandémie, loin d’apaiser les choses, a accentué ces dérives.

C’est une fois encore le mérite d’Amnesty International d’attirer notre attention sur les périls qui menacent nos démocraties. Ainsi je vous conseille la lecture de deux rapports récents, l’un sur les discriminations liées à la lutte contre la pandémie (ici) et l’autre sur la répression en France ().

« Aucun État membre ne doit jouir d’une présomption d’exemplarité ».

Si l’UE veut être crédible lorsqu’elle s’en prend (avec trop de mollesse à notre goût) aux gouvernements Orbán et Kaczyński, il est impératif qu’elle s’intéresse sans faiblesse aux reculs de l’État de droit et des libertés dans toute l’Union : aucun État membre ne doit jouir d’une présomption d’exemplarité.

L’adhésion à l’UE suppose en effet celle à ces valeurs et c’est loin d’être le cas. Au moment où j’écris ces lignes, la bataille pour lier la solidarité financière entre les États membres au respect de ces valeurs fait rage, et si le Parlement Européen est en pointe sur un lien effectif et rigoureux entre les deux, le Conseil (soit les gouvernements des États membres) a, quoiqu’en ai dit Charles Michel après le sommet de juillet, baissé pavillon face aux autoritaires menés par Viktor Orbán : la proposition déposée hier par la présidence allemande sera tout sauf opérante.

L’Union Européenne n’est pas – ne devrait pas être – un simple projet économique. Conçue à l’issue de la seconde guerre mondiale, elle est d’abord et avant tout une union de valeurs, lesquelles sont énoncées à l’article 2 du traité fondateur : « L’Union est fondée sur les valeurs de respect de la dignité humaine, de liberté, de démocratie, d’égalité, de l’État de droit, ainsi que de respect des droits de l’homme, y compris des droits des personnes appartenant à des minorités. Ces valeurs sont communes aux États membres dans une société caractérisée par le pluralisme, la non-discrimination, la tolérance, la justice, la solidarité et l’égalité entre les femmes et les hommes. »

Je souligne que la dignité humaine – celle de tous les humains, ici et ailleurs, présents et à venir – est placée en tête des valeurs de l’UE.

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Philippe Lamberts, eurodéputé Écolo, coprésident du Groupe des Verts/ALE au Parlement européen.