Budapest et Varsovie ravies de la victoire de Meloni en Italie

Le PiS et le Fidesz voient dans l’Italie une nouvelle alliée contre la Commission européenne, mais le rapprochement italo-centre-européen sera compliqué par le conflit en Ukraine.

La victoire de la coalition de droite et d’extrême-droite aux élections législatives italiennes dimanche a été accueillie comme une excellente nouvelle par les nationaux-conservateurs du Droit et Justice (PiS) en Pologne et du Fidesz en Hongrie.

Comme souvent, c’est Viktor Orbán qui a réagi le premier, en écrivant sur facebook : « Une victoire plus que méritée. Bravo Giorgia ! » Les ténors du Fidesz ont abondamment diffusé sur facebook lundi les nombreux clichés sur lesquels le dirigeant hongrois et Giorgia Meloni posent ensemble, complices. Son homologue polonais Mateusz Morawiecki s’est lui réjouit d’« une grande victoire ». Avec les nouveaux gouvernements probables en Italie et en Suède « préoccupés par les intérêts des États-nations, l’Europe devient une Europe de vraies valeurs », a aussi déclaré Mateusz Morawiecki, qui s’est dit « heureux qu’un tremblement traverse l’UE ».

Un rapprochement italo-centre-européen ?

Budapest et Varsovie espèrent que Rome sera un nouvel allié dans leur combat contre la Commission européenne, qui semble décidée à appliquer le principe de conditionnalité fonds européens-respect de l’État de droit et lutte contre la corruption. Comme eux, Meloni entend limiter les prérogatives de l’exécutif européen au profit d’un renforcement des compétences nationales des États membres, ce qu’ils nomment « l’Europe des nations » opposée à une Europe fédérale. Le vice-ministre polonais des Affaires étrangères, Paweł Jabłoński, estime que par leur vote les Italiens ont rejeté « les tendances centralisatrices et fédéralistes » de l’UE.

Celle qui est pressentie pour prendre les rênes de l’Italie dans quelques semaines, plaide de longue date pour un rapprochement de son pays avec le Groupe de Visegrád, entendu comme la Hongrie et la Pologne. Voici comment elle expliquait son tropisme centre-européen peu avant les élections législatives de 2018 : « Ce qui m’intéresse vraiment, c’est ce qui est en train de se passer à l’Est, où le groupe de Visegrád s’occupe de défendre les frontières de l’Europe contre l’immigration incontrôlée, de défendre l’économie réelle contre la spéculation financière qui règne à Bruxelles, et de défendre l’identité européenne contre l’islamisation de l’Europe ». Les migrants, les LGBT, les élites bruxelloises, le milliardaire George Soros, sont autant d’ennemis désignés qu’ont en commun Meloni et Orbán.

L’Ukraine, point d’achoppement

Mais la nouvelle donne géopolitique marquée par le conflit russo-ukrainien pourrait entraver le rapprochement attendu entre Rome et Budapest. Giorgia Meloni se dit fermement atlantiste et se prononce en faveur de sanctions européennes contre la Russie. Orbán, au contraire, veut mettre un terme et a même annoncé lundi au parlement une « consultation nationale » à cet effet : « Nous serons les premiers en Europe à demander l’avis du peuple sur les sanctions, comme nous l’avons fait avec la crise migratoire, l’épidémie de Covid et la question du genre ». Voilà qui augure de vives tensions avec la Commission européenne et les Etats membres, parmi lesquels, peut être, l’Italie de Meloni.

A Varsovie, on s’inquiète du poids que pourrait avoir dans le futur gouvernement Matteo Salvini, partenaire de coalition de Meloni, connu pour son tropisme russe et son admiration pour Poutine avant de prendre ses distances après l’invasion du 24 février.

Corentin Léotard

Rédacteur en chef du Courrier d'Europe centrale

Journaliste, correspondant basé à Budapest pour plusieurs journaux francophones (La Libre Belgique, Ouest France, Mediapart).

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