Sans surprise, les coordinateurs de la commission Développement n’ont pas réussi à se mettre d’accord et un ultime vote hier matin a rejeté la candidature de Rumiana Jeleva, la prétendante bulgare. Contrairement à ce qui avait été envisagé, ce n’est pas le ministre bulgare de la Défense qui a été proposé pour la remplacer, mais l’actuelle vice-présidente de la Banque mondiale, Kristalina Georgieva.
C’est hier, mardi 19 janvier, que la décision a été prise. Une véritable censure des groupes représentants la gauche au Parlement européen a eu raison de Rumiana Jeleva. Cette dernière semble avoir été profondément meurtrie par la campagne de dénigrement orchestrée par différents parlementaires européens, bulgares et autres. Reliée par les médias de Sofia mais aussi de l’Union, des rumeurs sur un conflit d’intérêt entre les différents mandats politiques et privés de Rumiana Jeleva ont décrédibilisées sa candidature ainsi que sa réputation professionnelle dans le cadre de sa nomination à la commission du Développement et de Réponses de crises.
La ministre bulgare des Affaires étrangères a même déclaré vouloir démissionner de tous ses mandats politiques et a émis l’intention de s’installer aux Etats-Unis. La blessure est profonde, elle s’est dit « touchée dans son honneur ». Le Premier ministre de Sofia, Boyko Borissov a rapidement pris acte de la décision bruxelloise et a immédiatement proposé la candidature de Kristalina Georgieva qu’il devait manifestement garder dans sa manche. Il y a une semaine, lors de l’audition ratée de Rumiana Jeleva, c’était le nom du ministre bulgare de la Défense qui circulait. Mais le Premier ministre a vite compris que des tares insurmontables marqueraient pour longtemps les candidats bulgares issus du monde politique de Sofia. En effet, dans les couloirs des parlements européens, la crédibilité des candidats de Bulgarie est entachée du sceau de la corruption. Pour éviter un nouveau scénario catastrophe, le chef du gouvernement s’est retourné vers une personnalité dont la formation et la compétence ne peuvent être mise en doute.
Le traité de Lisbonne renforce les pouvoirs des parlementaires européens, si la commission l’oubliait, ils lui auront rappelé à travers cet épisode. Le Premier ministre bulgare a refusé la démission de la malheureuse candidate de son poste aux Affaires étrangères et celle-ci remise de ces émotions devrait reprendre rapidement ses activités à Sofia et peut être même à Bruxelles et à Strasbourg, où, avant ce malheureux épisode, elle était députée…
Kristalina Georgieva, une remplaçante irréprochable
Toutefois et contrairement à la dernière fois, ce refus des parlementaires européens d’un candidat de la Commission n’a pas obligé José Manuel Barroso a revoir entièrement sa copie.
Les compétences de Kristalina Georgieva en matière de gestion de crises et de protection environnementale ne seront pas aussi aisément remises en cause qu’avec Roumiana Jeleva. Elle a publié près de 80 articles dans des revues spécialisées sur ces thèmes. Agée de 57 ans, la solution bulgare est vice-présidente de la Banque mondiale depuis 2008 mais y travaille depuis 1993. C’est une femme et c’est un point important, car le départ de Roumiana Jeleva et son éventuel remplacement par le ministre bulgare de la Défense aurait encore plus mis en péril la représentation du genre au sein de la Commission. De formation bulgare et anglo-saxonne, Kristalina Georgieva travaillera en contact étroit avec Catherine Asthon, la Haute représentante à la politique étrangère. Cette spécialiste des questions environnementales et de développement durable devrait donner complètement satisfactions aux eurodéputés qui se sont désormais parés d’une armure de défenseur de la probité et de l’honnêteté au coeur du « machin » bruxellois. Kristalina Georgieva a deux semaines pour préparer son grand oral et devrait passer devant les parlementaires le 3 février, afin que la nouvelle Commission puissent commencer officiellement ses activités le 9.