La fête nationale du 15 mars a été marquée par une manifestation « monstre » qui a rassemblé de vingt à trente mille personnes de l’opposition de gauche au gouvernement de Viktor Orban – selon des chiffres de la police -, pour réclamer le retrait de la loi sur les médias et critiquer la politique gouvernementale.
Depuis le pont Erzsébet, côté Pest, jusqu’à Ferenciek tere, l’avenue était noire de monde. La presse hongroise évoque « plusieurs dizaines de milliers de manifestants » et les organisateurs ont qualifié le rassemblement de « plus grand mouvement civil depuis le changement de régime« .

La loi sur les média était au centre des protestations mais, plus généralement, c’est toute la politique gouvernementale de Viktor Orban, qui a subi les foudres de la foule et des orateurs, le processus d’adoption de la nouvelle constitution en premier lieu. Parmi des étudiants, des musiciens, l’acteur Janos Kulka, l’intervention la plus remarquée a été celle d’une grande figure de la dissidence polonaise dans les années 60-80, Adam Michnik, qui est aujourd’hui directeur de publication de la Gazeta Wyborcza, le plus important quotidien national polonais. Il a demandé à son « ancien ami » Viktor Orban de ne pas limiter la liberté de la presse en Hongrie.
Un prétexte en or pour remobiliser la gauche
Ce n’est pas nouveau, chaque fête nationale en Hongrie se passe dans une profonde division nationale et est « récupérée » par les différentes factions politiques. L’intérêt se trouve d’ailleurs presque toujours du côté de l’opposition. Jusqu’à l’an dernier, lorsque les socialistes étaient au pouvoir, c’est la droite qui assurait le « show ». Cette année, c’est la gauche qui a réussi à marquer les esprits en surfant sur le succès de la contestation de la loi sur les médias entrée en vigueur au début de l’année. C’est son nouveau cheval de bataille. Car bien qu’officiellement le rassemblement a été organisé de manière apolitique par le groupe Facebook « Egymillióan a magyar sajtószabadságért », il est clair qu’hier, près de Erzsébet Hid, c’est la gauche traditionnelle, déchue de son pouvoir, – les sympathisants du MSZP et les libéraux du défunt SZDSZ – qui a profitée de l’occasion pour descendre dans la rue.
Et si tout n’était pas encore perdu ?
Il y a quelques jours seulement, après les retouches votées par le parlement hongrois pour contenter la Commission européenne, on aurait volontiers pensé que les carottes étaient cuites pour les opposants à la nouvelle législation sur les médias et que leur manifestation – la troisième de l’année – était vaine. Le conflit avec l’Europe semblait réglé, jusqu’à ce qu’une résolution du parlement européen appelle au retrait de la loi. Une résolution qui n’est pas contraignante juridiquement, mais qui pourrait toute de même inciter la Commission à réclamer de nouveaux « éclaircissements » sur cette loi. Les manifestants contestent encore l’indépendance et la composition du Conseil des médias.
Non loin de là, l’extrême-droite tenait aussi meeting
Au même moment, à quelques centaines de mètres seulement, quelques 2.000 sympathisants de l’extrême-droite se sont réunis sur Déak tér pour écouter les discours de députés de Jobbik, qui s’en sont pris tour à tour à la « criminalité tsigane », ont dénoncé le libéralisme et l’atlantisme, la gestion économique et sécuritaire de la Fidesz, etc. Jobbik, qui s’est fait assez discret depuis son entrée au parlement l’an dernier a repris de la voix et s’est fait plus virulent vis-à-vis du gouvernement ces dernières semaines pour tenter de retrouver sa popularité passée.
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Comme c’est mignon. Tous les bobos de Budapest dans la rue…
Marrant, ce sont ces memes personnes qui se disaient décues que la fete nationale ait un caractere trop politique… Il faut savoir ce que l’on veut.. :/
Hulala: et les activités dans le chateau? les portes ouvertes du parlement? Les hussards dans les rues? Les festivités place Batthányi?
Il n’y a pas que le méchant Orbán et les gentils manifestants dans l’actualité de ce 15 mars…
place Batthyány pardon!
Sziasztok! Pour info, le parlement se visite tous les jours (sauf week-ends et jours fériés) et gratuitement pour les citoyens de l’UE (même si certains s’amusent à faire payer ceux qui l’ignorent !), certes ce n’est pas une mauvaise idée d’en rendre la visite possible le 15 mars mais cela n’a rien de très spécial selon moi. Cela permet surtout d’admirer la « sainte couronne » dont on ne cesse de parler ces derniers jours, en rapport avec la constitution…
@François : j’ai eu l’impression de voir au moins autant de retraités fauchés (pléonasme en Hongrie ?) que de bobos, Szabad sajto ut. Suis-je seule à penser ça ?
@Boudika
Cherchez pas : souhaiter la liberté d’expression et refuser les restrictions des libertés publiques en général : être un bobo. Donc pas un « vrai magyar », du peuple, avec un moustache. Un « ennemi de l’intérieur quoi », un gauchiste, un homo, un juif, un « bourgeois de buda »… un « droit de l’hommiste »…