Le décret qui a la gueule de bois

Le décret du 6ème arrondissement de Budapest, officiellement en vigueur depuis bientôt deux mois, qui visait à fermer tous les bars et restaurants à 10 heures du soir, vient d’être amendé, comme l’a confirmé, jeudi, le député maire du 6ème, Csaba Hatvani. Dans ce quartier réputé pour sa vie nocturne, il s’est avéré, via plusieurs pétitions et démarches officielles de la part de collectifs de jeunes et de professionnels du secteur, que les riverains ne s’opposent finalement pas à leurs activités.

Après moultes hésitations, et une application « tolérante » du décret en septembre, c’est donc bel et bien fini, les noctambules peuvent reprendre leurs droits – toujours sous certaines conditions – sur Nagymézö utca et Liszt Ferenc tér, entre autres. Malgré le désaccord officiel du gouvernement et du Ministère de la Culture cet été, Csaba Hatvani avait pourtant insisté jusqu’au bout pour faire appliquer son « couvre-feu », apparemment cher aux vieilles dames du quartier des spectacles, Opéra et « Pesti Broadway » en tête.

« Kocc », une manif pour dire « santé » aux anciens

Fin juillet, c’est d’abord un collectif proche de l’ONG Critical Mass qui avait rassemblé quelques centaines de jeunes gens sur Jokai tér, pour protester contre cette mesure. La manifestation répondait au nom de « Kocc », abréviation du verbe « koccintani », qui veut dire trinquer en hongrois. Le décret allait, selon les organisateurs, ruiner la vie du quartier et plomber le chiffre d’affaires de restaurateurs déja d’humeur morose hors-saison. Ils espéraient frapper plus fort à l’aide d’une pétition reccueillant plus de 1500 signatures, mais cela n’a pas fait reculer le maire.

La riposte procédurière des « profi »

Depuis le 1er septembre, plusieurs « descentes » de police et de responsables municipaux ont eu lieu dans les établissements qui ne respectaient pas le décret, et ce, malgré l’apparente tolérance qui était de mise. La démarche qui a eu raison de l’obstination d’Hatvani a donc été celle, menée en bonne et dûe forme, des professionnels du secteur de la brasserie et de la restauration. Désormais, nombreux sont ceux qui peuvent se targuer d’obtenir la sympathie de plus de la moitié des propriétaires dans les immeubles où se trouvent leurs établissements. A Budapest, ce sont souvent les propriétaires fonciers qui décident de ce que peut faire le restaurateur ou le patron de bar en bas de leur immeuble. Avec un nombre de signatures suffisant, ceux-ci ont ainsi la permission de rester ouverts jusqu’à 6 heures du matin.

Jusqu’à maintenant, l’extension maximale du temps d’ouverture ne pouvait aller que jusqu’à 1 heure du matin. Cela dit, la possibilité d’être ouvert toute la nuit reste tout de même sous la menace d’un nombre de plaintes atteignant 60% des propriétaires. Dans ce cas, la fête tournera court. Pour les professionnels du quartier, si leur destin nocturne reste dans les mains des propriétaires fonciers, cet amendement est déjà une solution satisfante, mais temporaire.

François Gaillard

Cofondateur de Hulala et ancien membre de la rédaction

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