Lundi 16 août, la Cour d’appel de Varsovie a rejeté la plainte déposée contre les historiens Jan Grabowski et Barbara Engelking qui avait conduit à leur condamnation en première instance. Cette décision suscite la colère du PiS, le parti national-conservateur au pouvoir en Pologne.
En raison d’« inexactitudes » dans leur ouvrage Plus loin, c’est encore la nuit consacré à la complicité des Polonais dans la Shoah, les deux chercheurs avait été condamnés en février dernier à présenter des excuses à la partie civile, Mme Filomena Leszczynska, nièce d’Edward Malinowski, maire du village de Malinowo pendant la Seconde Guerre mondiale dont le rôle est questionné dans cet ouvrage. Le tribunal avait néanmoins écarté toute sanction financière, afin d’empêcher selon lui un effet dissuasif sur la recherche. Ce verdict avait pourtant suscité de fortes inquiétudes et motivé les deux historiens à interjeter appel de la décision.
En Pologne, les nationalistes au pouvoir mènent « une entreprise de déjudaïsation de la Shoah », selon l’historien Jan Grabowski
Lundi 16 août, la décision rendue par la juge Joanna Wisniewska-Sadomska est venue contredire celle rendue en première instance ; elle constitue une pleine reconnaissance de la thèse défendue par les deux requérants. Celle-là a en effet considéré que la plainte contre les chercheurs constituait « une atteinte inacceptable à la liberté de la recherche scientifique et à la liberté d’expression », qu’une salle d’audience « n’était pas le bon endroit pour mener un débat historique » et qu’il ne revenait pas à une Cour de justice de vérifier la méthodologie ou les sources mobilisées par les historiens.
La juge a considéré que la plainte contre les chercheurs constituait une « atteinte inacceptable à la liberté de la recherche scientifique et à la liberté d’expression » et « qu’une salle d’audience n’est pas le bon endroit pour mener un débat historique. »
Sans surprise, la coalition nationale-conservatrice au pouvoir a dénoncé ce jugement. Le ministre de la Justice, Zbigniew Ziobro, a indiqué via son compte Facebook que « Selon la Cour d’appel de Varsovie, les auteurs du livre sur le sort des Juifs, Plus loin, c’est encore encore nuit, sont des scientifiques. Ils peuvent donc mentir en toute impunité, transformer un héros en criminel, un Polonais aidant des Juifs en complice de leur mort. Ce n’est pas seulement un discrédit pour la Cour, c’est une attaque judiciaire contre la justice elle-même. »
Le feuilleton judiciaire n’est semble-t-il pas encore terminé. La Ligue polonaise contre la diffamation, fondation proche des nationalistes au pouvoir qui a appuyé la plainte initiale de la partie civile, a en effet annoncé son intention de déposer un pourvoi devant la Cour suprême de Pologne.