Des milliards pour réhabiliter le balcon de Budapest

Le gouvernement hongrois va augmenter son soutien au programme de réhabilitation de Normafa, vaste parc arboré situé sur les hauteurs du 12e arrondissement de Budapest. L’enveloppe allouée par l’État pourrait dépasser les 5 milliards de forint.

Avalisé en janvier 2015 par la municipalité du 12e arrondissement de Budapest, le programme de réhabilitation de Normafa devrait entrer dans sa deuxième phase de travaux. Confronté à des difficultés de financement, le projet vient en effet de recevoir un coup de pouce décisif de l’État, qui a décidé d’augmenter significativement l’enveloppe alloué jusqu’alors – évalué à 620 millions de forint par an. Selon le bourgmestre d’arrondissement Zoltán Pokorni (Fidesz), cette aide substantielle devrait porter à plus de 5 milliards de forint la subvention globale accordée par le gouvernement.

Et pour cause, bien que Normafa est avant tout connu pour son vaste parc, lequel fait la jonction entre les sommets de Széchenyi-hegy et János-hegy, le programme de réhabilitation concerne également la remise en état de vieux édifices construits au tournant du XXe siècle dans un esprit «villégiature». Ainsi, l’ancien Fácán vendéglő («Auberge du faisan») et sa villa Hild, ainsi que le vieux terminus du tramway hippomobile (egykori Lóvasút végállomás) vont connaître une nouvelle jeunesse. Dans un état de dégradation avancée, voire carrément en ruines, leur réfection explique à elle seule le montant de l’investissement.

L'Auberge du faisan, désormais en ruines. Wikimedia Creative commons.
L’ancienne villa Hild, proche de l’auberge du faisan, est désormais en ruines. Wikimedia Creative commons.

Le gouvernement prévoit ainsi de débloquer 950 millions de forint pour la seule Auberge du faisan d’ici la fin de l’année, puis la même somme l’année prochaine. Le projet est de transformer ce monument construit selon les plans de József Hild en Maison de l’environnement, principalement à destination des scolaires. Sur le même terrain, la villa Hild (photo) devrait recevoir 1,6 milliards de forint en 2017 puis 550 millions en 2018. Le vieux terminus du tramway hippomobile devrait bénéficier de 622,3 millions de forint de travaux afin d’y aménager un musée d’histoire locale.

Projet de réhabilitation du vieux terminus du tramway hippomobile.
Projet de réhabilitation du vieux terminus du tramway hippomobile.

Ce programme de réhabilitation a fait l’objet d’une loi spéciale, votée par le Parlement en septembre 2013, prévoyant le déblocage des fonds par l’État ainsi que la délégation à la municipalité d’arrondissement de compétences plus larges pour aménager ce secteur protégé. 340 hectares appartenant à l’État ont depuis été cédés à la collectivité et plusieurs consultations locales ont permis d’associer les riverains au projet d’aménagement. Des premiers travaux ont déjà été réalisés l’année dernière dans le parc (principalement des tables et des bancs), en lien avec le Parc national du Pilis, qui gère les zones de protection de la faune, de la flore et des paysages.

Aperçu des nouveaux bancs, avec en fond le centre de Budapest et le Danube. (c) WeloveBudapest
Aperçu des nouveaux bancs, avec en fond le centre de Budapest et le Danube. (c) WeloveBudapest

Le site Magyar Idők rappelle qu’une seconde villa Hild, située sur Budakeszi út, va également être transformée de fond en comble. Les travaux de réhabilitation ont déjà commencé avec la destruction des parties non originelles du bâtiment et la construction de nouvelles extensions. Ce projet, piloté cette fois par l’Académie des sciences, a un coût évalué à 824 millions de forint. Il est prévu d’y aménager les locaux du Centre de recherche en théories et pratiques artistiques (MMKI). Enfin, il faut signaler la réhabilitation imminente du vieux train à crémaillère, qui permettra de relier Széll Kálmán tér au sommet du Széchényi-hegy, où se trouve le départ du train des enfants.

 

Au-delà de l’aspect récréatif de ces aménagements, le programme va permettre de revigorer un quartier peu connu des non-Budapestois. Les hauteurs du 12e arrondissement, avec ses villas et ses infrastructures ferroviaires atypiques (tramway, train à crémaillère, train des enfants) rappellent un peu l’ambiance du Grand Budapest Hotel de Wes Anderson. Les somptueuses résidences et plus modestes pavillons qu’on y trouve sont souvent des beaux témoin du style «villégiature» (Bäderarchitektur), assez rare dans la capitale hongroise. Ce style est né sur les rives de la Baltique, à Heiligendamm à la fin du XVIIIe siècle et a prospéré dans toute l’Europe jusqu’au début du XXe siècle, principalement dans des cités thermales. En Europe centrale, on trouve ainsi de beaux exemples de ce style à Karlovy Vary, ville tchèque proche de la frontière allemande, ou encore à Lądek-Zdrój en Basse-Silésie (Pologne).

Ancienne carte postale avec le train à crémaillère de Budapest.
Ancienne carte postale avec le train à crémaillère de Budapest.
Ludovic Lepeltier-Kutasi

Journaliste, correspondant à Budapest. Ancien directeur de publication et membre de la rédaction du Courrier d'Europe centrale (2016-2020) et ancien directeur de la collection "L'Europe excentrée" (2018-2020).