Santé : la lutte anti-tabac pour des clopinettes

La semaine dernière, le conseil municipal de Budapest a fait un geste anecdotique contre le tabagisme. A partir du 17 juillet prochain, il sera interdit de fumer dans les souterrains de la ville.

Cela ne va pas pour autant faire de la Hongrie un élève modèle en Europe en matière de prévention dans la santé publique, et en particulier dans la lutte anti-tabac. La dernière législation anti-tabac dans la capitale date d’il y a un an, lorsqu’il a été interdit de fumer dans les jardins d’enfants. Aujourd’hui, ce nouveau décret anti-tabac dans les milieux souterrains n’aura un effet particulièrement important que dans les passages situés au-dessus  des stations de métro, les espaces fermés les plus fréquentés par les voyageurs. Ces derniers n’auront qu’à attendre d’être à l’air frais pour s’en griller une.

Au contraire, les vendeurs, les policiers en service, les contrôleurs BKV à la pause, les évangélistes prosélytes et autres habitués des lieux – sans-abris et vendeurs à la sauvette en tête –  seront les seuls à voir leur quotidien radicalement changer par cette décision. La loi ne concerne cependant pas encore les gares couvertes, Keleti, Déli et Nyugati, alors qu’elles pourrait s’étendre « bientôt » aux arrêt de bus et de tramways, en plein air.

Jusqu’à la mise en place d’une véritable législation nationale « anti-tabac », quasi-inexistante en Hongrie pour l’instant, Budapest devrait donc demeurer, encore pour quelques temps, la « capitale des fumeurs » parmi ses homologues de l’Union européenne.

En Hongrie, politiques et médias avalent la fumée

L’Irlande, en 2004, a été le premier pays de l’Union Européenne à voter une loi interdisant de fumer dans l’ensemble des établissements publics et sur les lieux de travail. Malgré l’absence de législation européenne contraignante à ce sujet, la quasi-totalité des autres pays de l’UE ont, depuis, suivi l’exemple irlandais en reléguant les fumeurs à l’extérieur des bâtiments publics ou en les « parquant » dans des zones limitées.

La Hongrie n’a, pour l’instant, pas adhéré à ce mouvement anti-tabac. Bien au contraire, à l’exception de quelques localités comme Kaposvár, où la municipalité a doté le centre ville de « zones fumeurs et non fumeurs », la possibilité d’allumer sa cigarette à l’intérieur reste à l’appréciation de la direction dans l’ensemble des lieux publics du territoire hongrois. Seule atteinte à la « liberté » des fumeurs : un espace obligatoire non-fumeur doit être aménagé, depuis 2004, dans tous les restaurants du pays.

Ce manque de prévention et de législation, selon l’expert international, Dr Tibor Szilágyi, est volontaire. Alors que plus d’un tiers de la population fume et que 28 000 personnes meurent tous les ans à cause de leur tabagisme, aucune campagne de répression, ni même de prévention, n’est sérieusement menée. Les gouvernements jouent la montre et les médias ne recrachent pas vraiment la fumée. Pour preuve, pour des raisons lobbyistes et budgétaires, l’Etat hongrois demande depuis 2002 des dérogations à Bruxelles sur le taux minimum de taxation sur le tabac qui devrait lui être imposé.

L’OMS tire la sonnette d’alarme

Du fait de ce « laisser-faire », les conséquences du tabagisme sur la santé publique en Hongrie semblent donc importantes. En avril dernier, l’Organisation Mondiale de la Santé a dressé un tableau peu reluisant à ce sujet concernant la population du pays. La responsabilité du tabac dans la « mauvaise santé » de la société magyare n’est, certes, pas exclusive mais elle saute aux yeux. Selon ce dernier rapport de l’OMS, la Hongrie connaît la plus grosse mortalité européenne du cancer du poumon (135 morts pour 100 000 habitants), des lèvres, du larynx, de la trachée et des bronches.

Prévalence de l’économie sur la santé

Malgré ces statistiques inquiétantes en matière de santé publique, les gouvernements hongrois, depuis 1989, n’ont jamais réellement fait la « guerre à la cigarette ». Il faut dire que les compagnies de tabac représentent un lobby économique très important dans le pays. Les deux plus importantes d’entre elles, British American Tabacco (BAT) et Phillip Morris emploient plus de 2000 personnes en Hongrie et œuvrent énormément en matière de culture, d’action sociale et de… santé dans les villes où elles se sont implantées.

Légiférer à l’encontre de tels pourvoyeurs d’emplois dans l’industrie est forcément une entreprise délicate pour le gouvernement. D’autant plus que les lobbyistes du tabac arpentent assidument les couloirs du parlement et bénéficient de nombreux soutiens en son sein.

Malgré cette incapacité des politiciens à légiférer, la Hongrie devrait tôt ou tard, sous la pression de Bruxelles, « rentrer dans le rang ». La question des espaces non-fumeurs a pour l’instant fait l’objet de résolutions et recommandations non contraignantes, au niveau européen. Mais une norme pourrait vite voir le jour pour forcer les pays « en retard », comme la Hongrie, à s’aligner sur le modèle européen.

La taxation : une solution à court terme et un cercle vicieux pour l’Etat

Parmi les solutions immédiates, en temps de crise économique, les hausses régulières du prix du tabac pourraient bien devenir assez dissuasives pour démotiver ceux qui ne font que commencer de fumer. Cette solution pourrait aider le gouvernement à réduire à la fois le tabagisme et le déficit . C’est en tout cas ce que souhaitait, il y a maintenant 7 ans, Péter Félix, fondateur de Hungarian Association of Smokebuster : « Notre plus grand espoir est que le gouvernement soit tellement endetté qu’il soit contraint d’augmenter un peu le prix des cigarettes, pour combler le déficit budgétaire ».

Seul problème de taille : mis en rapport avec le déficit public actuel du pays, l’augmentation radicale du prix du tabac ne  représenterait que des clopinettes. Et pour l’Etat, un trop bon effet préventif reviendrait à se tirer une balle dans le pied, tant la taxation progressive est fixée sur les dépenses publiques.

5 Comments
  1. Cher auteur,

    Je n’en peux plus de vos guillemets. Que ce soient des «» ou des «  », ils égrènent continuellement votre discours, si bien qu’on ne sait plus si vous recourez à une citation, ou cherchez à vous excuser auprès du lecteur d’une tournure trop hardie. Assumez donc votre audace !

    L’usage des guillemets répond en Français à des règles relativement précises, qu’en tant que journaliste de presse écrite vous ne pouvez pas méconnaître. Cessez d’en abuser, vous fatiguez le lecteur. Ce même lecteur est assez grand garçon pour comprendre de lui-même que chaque expression n’est pas à prendre au sens propre. Faites confiance à sa sagacité, endossez la responsabilité de vos formulations, et votre prose s’en trouvera bien allégée.

    Merci.

    Hardy-

  2. Hardi : un peu a cran ? Vous avez arrêté de fumer 😀 ?

    Il est vrai que les Hongrois fument de maniere général plus que certains autres peuples, surtout pour les 16-25 ans. J ai du mal a imaginer les bars-boites devenir dans un futur proche non fumeurs…

  3. hardi >
    « Assumez donc votre audace ! »
    j approuve 🙂

    sinon pour en revenir au sujet, de passer des espaces fermes exclusivement non fumeurs comme en france a la pleine liberte de fumer comme en Hongire, ca donne l impression de revenir 10 ans en arriere…
    pour les non fumeurs, vivement le droit a respirer sans fumee !

    il n y a pas les lobby de marchands de lessives aussi qui font pression ? 😀 en effet apres 5 min dans un bar hongrois, les vetements puent et doivent passer a la machine meme s ils sont propres…

    heureusement c est l ete et les kert sont par definition a ciel ouvert 🙂

  4. Un peu d indulgence Hardy! On est pas sur les pages du monde. Détends toi et va en griller une a l’ombre.

    Pour revenir au sujet de l’article, le problème du tabac dans les lieux publics et privés, c est aussi le respect de l’autre qui est en cause. A ce niveau la, je comprends un peu mieux pourquoi on fume partout ici.

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