La police fédérale du Canada et les services de l’immigration conduisent une enquête en coopération avec la police hongroise pour démanteler un trafic d’être humains présumé, dont certaines des victimes sont hongroises, rapporte le Hamilton Spectator.
« On m’a dit que je pourrais venir ici pour commencer une nouvelle vie, et j’ai été vendu en esclavage ». Voici ce qu’affirme, sous couvert d’anonymat, l’une des victimes hongroises d’un trafic d’êtres humains présumé. C’est un long voyage qu’elle a entrepris de Pápa, dans le nord-ouest de la Hongrie, jusqu’à Hamilton, en Ontario, proche de la frontière états-unienne. Comme plus d’une dizaine d’autres (combien exactement, on ne le sait pas), cet homme s’est fait berner selon un schéma classique : il a été approché par « l’ami d’un ami » qui lui a fait miroiter un salaire « d’au moins 500 $ par semaine en cash ».
La seule chose à faire pour lui : acheter un billet d’avion direction le Canada et obtenir le statut de réfugié en se présentant comme menacé dans son pays en raison de son origine rom. Car beaucoup des victimes, mais pas toutes, sont roms. « Ils m’ont dit de dire que j’étais opprimé par « Hungarian guard » [ndlr : sans doute signifie-t-il la Magyar Gárda] et d’amplifier le racisme en Hongrie ».
« Quand je suis arrivé là-bas, ce n’était pas la même histoire. […] Nous n’avons jamais vu un penny », continue-t-il. Il est dépossédé de ses documents d’identité et menacé de représailles sur sa famille s’il parle aux autorités. « J’ai peur pour ma famille qui est restée… Ils n’arrêtaient pas de me répéter que je ferais mieux de continuer le travail, pour la sécurité de ma famille. J’ai peur qu’il ne leur arrive quelque chose si je parle ».
Trois hommes ont été inculpés en vertu de l’Immigration and Refugee Protection Act pour avoir incité leurs victimes à mentir aux agents canadiens de l’Immigration : Attila Kolompár, Ferenc Karadi et Ferenc Domotor. Ce dernier a été décrit par la Cour comme « le chef d’un groupe de Roms hongrois qui composent les membres de sa famille immédiate et élargie ».
Quelle est l’ampleur du phénomène ?
Rien n’a encore été prouvé par la justice, nous n’en sommes qu’au stade de l’enquête, mais la police fédérale canadienne est formelle, il y a des « esclaves » à Hamilton. Selon elle, 600 à 800 personnes travailleraient comme esclaves chaque année au Canada, mais c’est une estimation très sous-évaluée, estime le coordinateur de la police fédérale pour le trafic d’êtres humains en Ontario, Marty Van Doren. Selon lui, « c’est un crime si bien caché que personne ne peut dire à quel point c’est gros. Il n’y a encore jamais eu de condamnation pour trafic d’êtres humains à Hamilton, mais cela existe sans conteste ». On les trouve partout où il y a besoin de main d’œuvre bon marché et docile : sur les chantiers et dans les restaurants notamment, sans même parler du marché de la prostitution.
Tziganes…