Les vraies-fausses chamailleries et les petites combines gazières entre la Russie et l’Ukraine motivent les Européens à faire aboutir leur projet de gazoduc Nabucco. En reliant les réseaux déjà existants en Autriche à ceux du sud de la Caspienne, ce tube devrait permettre de relier l’UE à d’autres fournisseurs énergétiques que le géant Russe et l’intermédiaire Ukrainien. Projet urgent pour un pays comme la Hongrie notamment, dépendante à 80% du gaz Russe.
Le projet Nabucco, c’est quatre pays à traverser et un consortium de cinq compagnies : la Hongroise MOL, la Roumaine Transgaz, la Bulgare Bulgargas et la Turque Botas, avec en plus la riche Autrichienne OMV qui vient chapeauter le tout. Pour voir Nabucco prendre forme vers 2014, les émissaires européens et les ambassadeurs des compagnies actionnaires du projet négocient dans tous les sens.
L’heure est à la diplomatie
La Turquie est le pays incontournable du projet. Grâce à sa position, Nabucco pourrait rejoindre les réseaux d’énergie syrienne et surtout irakienne. D’ici au 30 juin, l’Europe devra convenir avec Ankara d’un accord sur le transit du gaz en Turquie, qui souhaite acheter une partie du gaz avec, en contre-partie, la possibilité d’un compromis sur l’énergie dans le cadre des négociations de son adhésion à l’Union. Cela dit, il faudra également passer outre les problèmes pétroliers que la Turquie entretient avec Chypre, et convaincre celle-ci de lever son veto, qui bloque actuellement cette partie des discussions.
Côté fournisseurs, rien n’est gagné pour les Européens assoiffés d’énergie, mais avoir fait signer la déclaration du sommet de Prague à l’Azerbaïdjan cette semaine est une véritable brèche dans l’hégémonie énergétique de Moscou autour de la mer Caspienne. Certains diplomates optimistes disent même avoir bon espoir d’engager le Turkménistan et ses importantes ressources dans l’aventure, compte tenu du gel actuel de ses rapports avec la Russie. Hors de question toutefois de discuter business avec l’Iran en ce moment, pour raisons atomiques. L’Irak pourrait finalement redevenir une option alléchante, mais ce ne sera pas sans compter avec les américains.
La Hongrie se la joue à l’Ouest et parle finances
Présent cette semaine à Washington, le chef du comité parlementaire hongrois de Nabucco, János Kóka, a affirmé à MTI que l’administration Obama soutenait Nabucco et se prononçait en faveur de l’indépendance de l’Europe envers le gaz russe, selon les dires du Vice-Président Joe Biden et de la Secrétaire d’Etat Hillary Clinton. Un responsable au Département d’Etat est également tombé d’accord avec Kóka sur le fait que l’Irak pourrait, à terme, devenir fournisseur de l’Europe. La Banque Mondiale a elle aussi exprimé son intérêt en envisageant de contribuer à Nabucco à hauteur de 100 millions de dollars US. Enfin, Mihály Bayer, ambassadeur hongrois du projet, a lui évoqué lors d’une conférence à l’ambassade d’Azerbaïdjan en Hongrie ce jeudi que la construction du gazoduc pourrait en partie être financée par des banques américaines, voire chinoises. Un tiers du financement viendra des 5 compagnies composant le consortium, et la Banque Européenne d’Investissement devrait promettre 25%. La chasse aux fonds est ouverte.